Il y a quelques temps, un article de votre revue, j’ai malheureusement oublié le nom de son auteur, citait un auteur pourtant rarement cité, René Guénon. Cela a attiré mon attention. Dans son œuvre importante, j’ai lu ou relu les deux livres qui me semblaient de circonstance : la Crise du Monde Moderne, écrit en 1925 et le Règne de la Quantité ou les Signes des Temps, publié en 1945.
Les deux sont une étude de la période actuelle et montrent l’envahissement du matériel au dépend du spirituel.
C’est une évidence.
Les civilisations anciennes, de façon générale, ont fait dépendre les lois régissant la société du monde religieux. Le cas le plus flagrant est le monde israélite ou juif où tout dépend de la bible, du deutéronome, en passant par l’alimentation et allant jusqu’à l’habillement (l’interdiction des mélanges de matières, par exemple) etc.
Et le monde musulman, dont la charia nous occupe tant, est un autre exemple.
Le monde chrétien est un contre-exemple. Lorsque Saint Pierre accepte de dîner chez un centurion romain, il abandonne la cacherout. Lorsque le Christ dit à l’homme qui lui demande s’il doit payer l’impôt à Rome : rend à César ce qui est à César, la pièce de monnaie portant l’effigie de César, il reconnait la loi romaine et en même temps dispense de payer l’impôt au temple. Le christianisme n’a pas cette soumission de la loi civile (au sens de la loi de la société, car cela inclut le pénal, le commercial etc.) à la parole divine.
Pourtant, longtemps, le roi étant de droit divin, le matérialisme a été contenu, tout en devenant de plus en plus présent.
La révolution, en France, a mis fin à cet état de chose.
Depuis, le spirituel est réduit à sa plus simple expression. Et donc, seul le bien matériel compte.
Cela explique bien des choses dans la situation actuelle.
Et cela est sans doute sans remède. En effet, il n’existe rien d’autre que le matériel et chacun n’a plus qu’un seul désir, c’est de vivre aussi bien que possible, aussi longtemps que possible. De mourir en bonne santé et que la terre veuille bien nous porter tant nous sommes là !
Je crois qu’essayer de changer cet état de chose relève de l’utopie, d’autant que s’il y a des intégristes, je pense qu’ils ne seront jamais que minoritaires. Et comment expliquer, à des gens pour qui seul le monde matériel, importe qu’il faut qu’ils acceptent de se contenter de moins ? Alors que tout, publicité, télévision, internet, leur montre un monde où les gens ont tout ?
Et qui voudrait se soumettre à une loi religieuse ?
Et est-ce que ce serait la solution ?
Ayant dit cela, je continue dans la réflexion.
Tout indique une disparition du travail rémunéré. Il me semble bien inutile de développer cette déclaration. Il faut donc séparer le revenu du travail. Cela montre la futilité des discussions actuelles sur la retraite, puisque celle-ci reste liée au revenu du travail.
Cela montre aussi l’importance des recherches sur le revenu universel. C’est en effet la seule possibilité.
Mais là aussi, comment faire admettre que l’on puisse recevoir sans autre contrepartie que d’exister ?