Émoticones


par  J. GRIEU
Publication : juin 2020
Mise en ligne : 4 octobre 2020

Pour illustrer son article, B.Blavette a choisi le poème ci-dessous dans le recueil Maux à Mots de Jacques Grieu. Il apprécie tant la façon dont cet auteur manie les mots, qu’il suggère à nos lecteurs de commander ce recueil de 130 pages (format 24 x 16 cm), en envoynt un chèque de 13 euros + 4 euros (pour les frais d’envoi), à JACQUES GRIEU, 98 BD Clémenceau, 76600 Le Havre. Cet auteur se fera un plaisir de vous l’expédier.

Plus d’erreurs de grammaire ou de ponctuation,
De fautes d’orthographe ou d’accentuation !
De l’écriture, enfin, c’est l’aboutissement,
C’est l’ultime progrès, le perfectionnement.

C’est la fin des polices aux dessins délicats ;
Adieu les new romans, cochins et cambrias,
Finis, l’helvética, le times et le didot.
Exit, le genova et le palatino !

Les styles d’écriture ont changé de logique :
Plus d’anglaise ou bâtarde ou de ronde ou gothique.
Et les grasses et les maigres ou bien les italiques,
Sans parler des chinoises ou de la cyrillique.

Inventée à Sumer, disent les historiens,
L’écriture annonçait la fin des temps anciens,
Les débuts d’une autre ère où on se souviendrait
Où mémoire et cerveau ensemble augmenteraient.

Avec les hiéroglyphes, on eut les pictogrammes
Et les cunéiformes et les idéogrammes.
Il fallut cinq mille ans de progrès anarchiques,
Pour arriver enfin à l’alphabet classique.

Et puis l’imprimerie fit sa révolution
Qui fut pour l’écriture une révélation ;
Car avant Gutemberg, c’était l’architecture,
Qui était pour le peuple un moyen d’écriture…

Tout cela enterré ! Vive les novateurs !
Vive les émojis, les smileys et les cœurs !
Pourtant, je me demande avec fort peu d’entrain,
Jusqu’où notre écriture ira-t-elle demain ?