Fin du travail ou faim de travail ?

DOSSIER : LE TRAVAIL III (suite)
par  A. HILDE, R. POQUET
Publication : mars 2005
Mise en ligne : 4 novembre 2006

Nous poursuivons la publication des réflexions du groupe “La lanterne” sur le travail. Dans les deux parties déjà publiées (GR 1050 et GR 1051), nos amis rappelaient que la façon dont les sociétés considèrent le travail humain a beaucoup varié au cours de l’Histoire (chapitre I), évoquaient les apports de la pensée économique et sociologique à cette évolution (chapitre II) et posaient la question de savoir si le travail est, pour l’humanité, une réalisation, comme l’est une œuvre (chapitre III). Ils ont ensuite donné quelques chiffres et deux schémas pour aborder maintenant les problématiques et les questions actuelles, puis examiner les diverses façons de sortir de la crise :

 IV. LES PROBLÉMATIQUES (suite)

AVANT 1929 :
PHASE D’ÉCONOMIE AGRICOLE ET INDUSTRIELLE
- RARETÉ DES PRODUITS - CROISSANCE SOUTENUE -
PAS DE CHÔMAGE

C’est le travail salarié qui, en grande partie, met en mouvement le mécanisme de l’échange économique et le couple production - consommation : « L’emploi est le lieu d’un contrat, n’est-ce pas, un contrat où se croisent, et devraient se satisfaire réciproquement, en bonne logique, deux besoins. L’employeur a besoin que les emplois qu’il offre soient remplis pour que soit assurée sa production (et garantis ses bénéfices). L’employé a besoin de remplir l’emploi qu’il occupe, ou qu’il recherche, pour que soit assurée sa subsistance. Si l’un de ces besoins disparaît (parce que la production est suffisante avec les emplois existants, par exemple, ou le serait même à défaut de certains d’entre eux ; ou bien parce qu’elle n’a pas de débouchés), le besoin symétrique se trouve sans point d’appui. Il bée dans le vide. Il n’y a plus de contrat possible. Il n’y a plus d’emploi concevable » (Renaud Camus).

SITUATION EN 2 000 :
PASSAGE À L’ÈRE DE L’INFORMATION

L’ère informationnelle relaie l’ère mécanicienne. L’automation « réside dans la substitution d’organes technologiques aux organes humains d’effort, d’observation, de mémoire et de décision. » (René Passet).

Une abondance potentielle ou réelle fait son apparition. Dans certains secteurs, des crues de production engendrent la mévente, ralentissent la croissance et gèlent l’investissement. Face aux importants profits dégagés par la capitalisation et la spéculation, les revenus du travail sont en baisse (ces 20 dernières années, la part des salaires dans la richesse nationale a chuté de plus de 10 % pour s’établir à 57,2 % en 2002) et, en raison d’un chômage élevé, une énorme machine à redistribuer les revenus est mise en place. La poussée va en ce sens : Revenus du travail, du capital et des produits financiers => Impôts directs et indirects + déficit public [1] => État et Collectivités territoriales => Fonctionnaires et bureaucratie => Redistribution =>Revenus hors travail et hors capital (subventions, prestations sociales, retraites).

La redistribution provoque une augmentation des charges imposées par l’État et les collectivités territoriales, alourdissant ainsi les coûts sur les marchés intérieur et extérieur.

Un exemple qui permet de mesurer l’ampleur de cette redistribution : les prestations sociales représentent 50 % du revenu disponible brut des habitants du Nord Pas de Calais [2]. Quand le travail se raréfie, le mécanisme de l’échange économique est objectivement et définitivement perturbé.

 V. LES QUESTIONS ACTUELLES

Le dysfonctionnement que nous venons de constater appelle quelques questions :
• 1. Assistons-nous à la disparition progressive de la valeur-travail ?
Le titre retenu par la philosophe Dominique Méda pour l’un de ses ouvrages est sans ambiguïté : Le travail, une valeur en voie de disparition.
Deux remarques à cela : Souvenons-nous de la prophétie de Nietzsche : « toujours plus d’argent, toujours plus de labeur » et du constat d’Hannah Arendt : « choses dévorées ou jetées presque aussi vite… pour que le processus lui-même ne subisse pas un arrêt catastrophique ».
La réalité : le travail, moteur irremplaçable de l’économie de l’échange. La pensée unique  : le travail, une valeur irremplaçable.. La situation est bloquée. Autre sujet de réflexion : le travail se transforme et cette transformation détruit peu à peu sa valeur. Au “travail matériel” se substitue le ”travail immatériel”  : « Tandis qu’on pouvait mesurer la valeur d’une société en termes d’actifs réels comme les biens immobiliers, les machines, les stocks et les inventaires, la valeur des entreprises réside de plus en plus dans leur capacité d’acquérir, d’engendrer, de distribuer et d’appliquer le savoir de manière stratégique et opérationnelle… La connaissance (ici entendue au sens large de manière à inclure les données, l’information, les images, les symboles, la culture, l’idéologie et les valeurs) est la ressource centrale de l’économie » (A. et H. Toffler).
« Le travail n’est plus mesurable selon des étalons et des normes préétablis… La crise de la mesure du travail entraîne inévitablement la crise de la mesure de la valeur … L’économie de la connaissance contient une négation de l’économie capitaliste marchande » (A. Gorz).

• 2. Quels liens entre croissance et emploi  ? Le divorce est consommé entre croissance et emploi. Une croissance du PIB inférieure à 3 % l’an ne crée plus d’emplois. Ceux-ci se sont maintenus à l’aube de l’irruption d’une production abondante (5,6 % de croissance dans les années 60). Mais très vite l’engorgement des marchés a freiné la croissance (3,7 % dans les années 70, 2,2 en 80, 1,8 % en 90, environ 2 % depuis), et le nombre de chômeurs a pris son envol (300.000 en 1960, 3 millions en 1990).
Imaginons que, par miracle, la tendance s’inverse : avec une croissance de 4 % l’an, la production doublerait tous les 18 ans et serait multipliée par 7 en 50 ans.
Alors ? Sauver l’économie marchande en poussant la croissance dans l’espoir illusoire de maintenir l’emploi ? Ou sauver la planète en adoptant d’autres règles du jeu économique qui préserveraient les écosystèmes ? — Un enjeu de civilisation.

• 3. Face à cette crise de l’emploi, quelles mesures ont-elles été prises ou envisagées  ?
LES ACTEURS :
Les victimes : Travailleurs à temps partiel, héritiers de petits boulots, plus de 50 ans, jeunes qui peinent à entrer dans la vie active (statistique récente : 49 % de jeunes ayant un Bac + 4 n’ont toujours pas trouvé de premier travail après un an de recherches ).

Les entrepreneurs : Pris dans une concurrence de plus en plus farouche, assommés par des charges sociales de plus en plus lourdes (redistribution oblige), tous les moyens sont bons pour survivre : réduction des durées d’usage, invention de nouveaux produits (en 10 ans, les rayons des grandes surfaces ont proposé 75 % de produits en plus), publicité délirante …

Les partis politiques : La gestion de la crise leur échappe, en dépit d’efforts souvent méritoires. La dernière tentative de peser sur l’économie date des années 81 à 83 : elle a été un échec  ; la financiarisation de l’économie mondiale était en marche depuis 1974, date de la libéralisation des marchés.

Les syndicats : Affaiblis par un taux de syndicalisation à 8 % des effectifs salariés (25 % en 1975), ils sont le baromètre de la dégradation du travail (CDD, temps partiel), du poids de l’actionnariat (restructurations), de la concurrence nationale et internationale (fermetures et délocalisations).

L’Etat et les collectivités territoriales  : La mesure la plus spectaculaire prise ces dix dernières années en vue de la réduction du temps de travail est le passage aux 35 heures par semaine. Mesure qui va dans le sens de l’Histoire, mais qui s’est heurtée à deux obstacles principaux  : sa brutalité, alors que la productivité (richesse par personne active) n’a cessé d’augmenter au fil des ans, le nombre d’heures de travail hebdomadaire était bloqué à 39 heures depuis plus de quinze ans ; et son uniformité, la plupart des entreprises ont un intérêt économique fort à avoir peu de salariés travaillant beaucoup plutôt que beaucoup de salariés travaillant peu. L’avenir de la réduction du temps de travail serait-il compromis ?

Les mouvements revendicatifs : Ils sont nombreux et représentent une nouvelle force montante, celle de la société civile. Associations de tous ordres qui agissent ou tentent d’agir soit sur le quotidien, soit à l’échelon national, voire international, associations d’usagers et d’éducation populaire. Le plus imposant est Attac, avec plus de 30.000 adhérents ; son espoir est de “mettre de l’ordre” dans la maison capitaliste en corrigeant ses effets néfastes, entre autres en matière d’emploi.

LES OBSERVATEURS ET LES CONSEILLERS :
Ils font les beaux jours de l’édition et de la presse spécialisée  : il n’est pas rare de lire sur la même page deux analyses diamétralement opposées.
On distingue deux courants de pensée principaux, le courant néo-libéral et le courant marxiste. Ils se rejoignent sur un point : il faut conserver au travail toute sa valeur, aussi doit-on maintenir l’emploi à tout prix.
À noter, un courant réformiste, représenté majoritairement par les partisans d’une économie solidaire. Le travail permet réalisation de soi et intégration sociale, à condition d’être organisé autrement et de laisser moins de place à la rentabilité et à la marchandisation des rapports. Créons des réseaux parallèles d’activité coopérative, réseaux bancaires (micro-crédit) et monétaires (monnaies affectées à des opérations précises, si possible non marchandes). Reconsidérons la notion de richesse en y introduisant des indicateurs humains. Réduisons la croissance (croissance soutenable, croissance sélective).

LES MESURES QUI VONT DANS LE SENS DE L’HISTOIRE :
• 1 La semaine de 4 jours : Proposition séduisante mais difficile dans son application : elle ne ferait qu’aggraver les effets de l’application de la loi sur les 35 heures.
• 2 Le cycle de travail annualisé : Le passage aux 35 heures a eu, entre autres vertus, d’engager certains types d’entreprises, à l’activité irrégulière, à régler le temps de travail sur l’année et non plus sur la semaine.
• 3 Le cycle de vie : Le temps de travail de chaque actif est étalé sur le cycle de vie, en alternance avec d’autres préoccupations ou nécessités. C’est ce qu’entrevoit le sénateur Henri Weber : « Un salarié, par un ensemble de systèmes institutionnels de financement, sera soit au travail dans son entreprise, soit en formation, soit en congé parental, soit en congé civique, soit à son propre compte dans le cadre de l’essaimage, mais ne sera jamais laissé sans revenu et sans statut » (Le Monde, 12/2/2004).
Question : les périodes hors travail étant de loin les plus nombreuses, qui les rémunère dans une économie dont les mécanismes prennent appui sur le travail (voir le schéma de l’échange économique dans le chapitre précédent)  ? Estce possible sans un alourdissement conséquent de la redistribution par augmentation des prélèvements obligatoires ?
Ce n’est pas en clamant la fin du travail (tendance Jeremy Rifkin), ni son indispensable maintien (tendance marxiste), ni l’extension de sa sphère à toutes les activités (discours dominant actuel), que nous trouverons des solutions adaptées à notre époque.

 VI. UNE SORTIE DE CETTE CRISE DE L’EMPLOI EST-ELLE POSSIBLE ?

1. LES RAISONS DU BLOCAGE

a) D’ordre politique, la peur de la dépendance personnelle :
« La Révolution française avait une théorie politique légitimant des interventions de la société sur elle-même[…] Mais le XXème siècle ne dispose pas d’une théorie politique capable de fonder en raison des interventions de la société sur elle-même.[…] Pourquoi ne disposons-nous pas d’une telle théorie ? Parce que nous ne sommes pas parvenus à sortir de l’opposition stérile entre deux traditions, deux visions de la société également anachroniques, l’une considérant la société comme une simple agrégation d’individus (societas, Gesellschaft), l’autre comme une communauté dans laquelle le tout prime sur les parties (universitas, Gemeinschaft).[…] Reconnaître que la société peut être une communauté et qu’il existe un bien commun, c’est toujours risquer l’oppression de l’individu. Alors que les temps modernes s’appuient précisément sur la découverte que la liberté de l’individu est infinie. Pour cette tradition, toute entreprise visant à chercher un bien commun à l’ensemble des individus est interprétée comme une volonté de supprimer la liberté individuelle. C’est pourquoi la politique se réduit alors au minimum : elle se borne à garantir le bon fonctionnement de l’ordre naturel, dont les lois sont déterminées par l’économie.[…] L’idée la plus répandue aujourd’hui est donc que nous avons le choix entre d’un côté, les inégalités et de l’autre, l’oppression de l’individu, et qu’entre les deux il vaut évidemment mieux choisir les inégalités. [3] »

b) D’ordre psychologique, la peur de l’inactivité  : « Cette liberté nous fait clairement peur aujourd’hui. Les politiques craignent la délinquance, l’ennui. L’idée d’une diminution de la place du travail dans nos vies amène sur la scène le spectre de la surconsommation et de l’individualisme [3]  ».
« la quantité de travail qu’il sera encore nécessaire de faire, nous nous arrangerons pour que le plus grand nombre d’entre nous en ait sa part. Trois heures de travail chaque jour par roulement ou une semaine de quinze heures peuvent ajourner le problème pour un bon moment.[…] Ainsi, pour la première fois depuis sa création, l’homme fera-til place à son problème véritable et permanent : comment employer la liberté arrachée aux contraintes économiques ? Comment occuper les loisirs que la science et les intérêts composés auront acquis pour lui, de manière agréable, sage et bonne ? […] Si le problème économique est résolu, l’humanité se trouvera donc privée de sa finalité traditionnelle. […] Pour parler le langage qui fait fureur aujourd’hui, ne devons-nous pas nous attendre à une « dépression nerveuse » universelle ? [4] »

c) D’ordre économique, la peur de nouvelles règles du jeu :
« Aucune forme de redistribution fiscale ne peut solvabiliser la demande puisque la distribution primaire n’a plus lieu [5]. »
« Comment fournir un revenu à des gens qui ne parviennent pas à trouver un emploi rémunérateur ? Si c’est une technologie sans travailleurs qui produit les richesses de la société, il nous faut imaginer une manière totalement différente de partager ces richesses et ne pas en rester au système des salaires [6]. »

2. COMMENT LEVER CE BLOCAGE ?

a) Dans le domaine politique : par la réhabilitation de l’Etat : « Une société moderne ne peut être une véritable communauté si un Etat ne lui sert pas de catalyseur et de médiateur… Avant même d’être un régulateur de la croissance ou un correcteur des inégalités, un tel Etat aurait pour tâche première d’organiser continûment l’espace public… En effet, le choix des principes selon lesquels seront réparties les richesses est l’acte le plus politique, donc à la fois le plus antinaturel, le plus humain et le plus risqué qui soit. [3] »
« La fin de l’économie de marché peut devenir le début d’une ère de liberté sans précédent. La liberté juridique et la liberté réelle peuvent être rendues plus grandes et plus générales qu’elles ne l’ont jamais été. Réglementer et diriger, cela peut être la manière de réaliser la liberté non seulement pour quelques-uns mais pour tous. […] Mais nous trouvons le chemin barré par un obstacle moral. La planification et le dirigisme sont accusés d’être la négation de la liberté. La libre entreprise et la propriété privée sont déclarées parts essentielles de la liberté. On dit qu’aucune société bâtie sur d’autres fondations ne mérite d’être appelée libre[…]. L’économie libérale a imprimé une fausse direction à nos idéaux. Elle a paru s’approcher de la réalisation d’espérances intrinsèquement utopiques. Aucune société n’est possible, dont le pouvoir et la contrainte soient absents, ni un monde où la force n’ait pas de fonction. [7] »
« Qu’on le veuille ou non, l’État est inséparable de la société. Or, la société a, pour objet premier, de faire que tous les individus jouissent de la plus grande somme de bien-être ; et, pour objet second, que s’épanouisse partout la vie intellectuelle et morale. On voit ainsi que la recherche du bienêtre et de la sécurité matérielle n’est pas une fin, mais le moyen de permettre aux hommes de goûter les joies de la vie supérieure, fruit de la civilisation.
En conséquence, l’État doit devenir l’expression directe de la nation, le mandataire de la conscience collective, le gérant du bien commun [8]. »

b) Dans le domaine psychologique, par un effort d’éducation et d’information :
« Ce qui est honteux, ce n’est pas d’avoir perdu son travail ! Il n’y a rien de honteux là-dedans ! Ce qui est honteux, c’est ne savoir que faire de son temps. Ce qui fait peur, chez les chômeurs, c’est leur peur effroyable du temps. Qu’ils aient peur du lendemain, on les comprend. Mais qu’ils aient peur du jour même, de la journée, de ses heures vides ? Elles ne sont vides que parce qu’ils les voient telles, les font telles … On ne leur a pas appris à les voir autrement [9]. »

c) Dans le domaine économique, par la rupture du lien qui unit emploi et revenu. La remise en cause de la chaîne de l’échange (un revenu contre un travail) entraîne une nécessaire distribution des richesses indépendamment du travail fourni. Des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent en ce sens :

• un humoriste : « On dit qu’il y a trois millions de personnes qui veulent du travail. C’est pas vrai. De l’argent leur suffirait. » (Coluche).

• une députée : Le dividende universel, un projet de société à transformer en projet politique (Christine Boutin).

• des cadres d’entreprise : « Demain il sera possible d’occuper un emploi sans nécessairement percevoir de l’entreprise une rémunération, de percevoir un revenu sans exercer d’activité, d’exercer une activité en percevant un revenu assuré par des tiers autres que l’employeur. Cette distanciation du salaire, par rapport à sa définition de contrepartie naturelle du travail, et cette émergence forte de la notion de revenu conduiront la société à ouvrir le débat sur l’organisation de nouvelles formes de distribution ou de redistribution des richesses ». (revue de la CFE-CGC Encadrement Magazine, 1995).

• des consultants d’entreprise : Selon Jarrosson et Zarka, « ce paradoxe [de la misère dans l’abondance] est fondé sur le lien absolu entre travail et revenu ; la sortie par le haut de ce paradoxe se trouve dans la rupture de ce lien ».

• le Commissariat général du Plan  : « Le nombre de personnes qui perçoivent des revenus sans contrepartie immédiate de travail productif s’élève encore avec le chômage. On peut estimer à 40 % du revenu total des Français la valeur des prestations sociales de toute nature qu’ils reçoivent … Il faut favoriser les allers-retours du statut de salarié à celui d’entrepreneur individuel, à celui de recyclé en formation et à celui de bénéficiaire d’un congé de longue durée pour convenance personnelle … par un système … garantissant la continuité du revenu quelle que soit la situation du moment pour l’intéressé. » (Rapport Boissonnat. Le travail dans vingt ans, 1995).

• des économistes :
ERIC MAURIN : « Il vaut mieux protéger les salariés que les emplois ».

MICHEL HUSSON : « Il faut prendre en tenailles la logique salariale marchande, de l’intérieur par la transformation du travail, de l’extérieur par l’extension d’un revenu garanti ».

RENÉ PASSET : « Ce qui, contre vents et marées, se réalisera, c’est le double mouvement de relève de l’homme par la technologie et de déconnexion du revenu par rapport au travail ».

KARL MARX : « La distribution des moyens de paiement devra correspondre au volume de richesses socialement produites et non au volume de travail fourni ».

JACQUES DUBOIN : « le droit aux produits et aux services doit être libéré de la considération du travail fourni… le revenu social dissocie le travail et sa rémunération, puisque le travail de l’homme, conjugué avec celui de la machine, fournit un rendement qui n’est plus proportionnel ni à la peine, ni à l’effort du travailleur ».

BERNARD MARIS : « L’allocation universelle permettra de détacher définitivement le travail du salaire. En fait, elle prendra acte de la fin du travail et distribuera des droits à consommer sur le volume des richesses socialement produites. C’était déjà l’idée de Jacques Duboin, qui parlait de “revenu social”. Ce revenu n’avait plus rien à voir avec la “valeur” propre du travail (le minimum vital, les produits nécessaires à la reproduction de la force de travail dont parlaient Marx et Ricardo), mais correspondait aux besoins, désirs et aspirations que la société se donnait les moyens de satisfaire. Ce revenu social supposait, selon Duboin, la création d’une monnaie de consommation, non thésaurisable, ensemble de droits sur les biens que l’on devait immédiatement exercer. »

(à suivre).


[1en France, 45 milliards d’euros en 2 005. En 2 004, la dette publique, qui représente les déficits accumulés d’année en année, s’y élevait à 1.000 milliards d’euros et représentait 63 % du Produit Intérieur Brut.

[2déclaration du Président de Région lors de la fermeture du site Metaleurop en janvier 2 003.

[3Dominique Méda, Le travail, une valeur en voie de disparition.

[4J.M. Keynes, Essais sur la monnaie et l’économie.

[5André Gorz, Transversales/ science/culture sep-oct 1997.

[6Jeremy Rifkin, La fin du travail.

[7K. Polanyi, La Grande Transformation.

[8J. Duboin, Les Yeux Ouverts.

[9R. Camus, Qu’ il n’y a pas de problème de l’emploi.