Sarah Ayre,
Nelson
Nouvelle ZélandeOBJET : Soutien militaire apporté par la Nouvelle Zélande aux Etats-Unis dans sa guerre contre le terrorisme.
Au Premier Ministre,
aux Membres du Parlement de la Nouvelle ZélandeLe 12 octobre 2001.
Messieurs,
Qui ne dit mot consent, dit un vieux proverbe français. C’est parce que je ne veux pas que mon silence puisse être interprété comme un assentiment que je vous adresse cette lettre.
Je vous écris en tant qu’être humain aimant la vie, en tant que simple citoyenne de la Nouvelle Zélande, et aussi, en tant que votre employeur, puisque je vous rémunère pour vos services avec mes impôts et les taxes que je paie. Je suis donc, en fin du compte, responsable, avec l’ensemble de la population de notre pays, des actions du gouvernement : nous avons tous, en effet, à vivre ou à mourir des conséquences de ces actions.
Je regrette profondément et j’ai honte que la Nouvelle Zélande accorde son plein soutien aux méthodes utilisées par le Président Bush pour répondre aux attentats contre le World Trade Centre et le Pentagone le 11 septembre dernier.
Il est tout à fait compréhensible que chaque pays n’ose pas dire tout haut ce qu’il pense tout bas, puisque le Président Bush a annoncé au monde d’une manière très menaçante : "soit vous êtes mon allié, soit vous êtes un terroriste ou, tout au moins, vous soutenez le terrorisme".
Il est cependant irresponsable de soutenir une telle stratégie insensée dont l’enjeu est énorme puisqu’il s’agit de la survie de l’humanité et peut-être même de la planète. Dans quel but s’engouffrer dans des actions du type "oeil pour un oeil..." ? La plupart d’entre nous sait bien que ce genre de stratégie ne fait qu’accentuer le cycle destructif de haines et de rancoeurs ... La politique de Bush, loin de mettre fin au terrorisme, le renforcera. De plus, il utilise lui-même des méthodes terroristes : cherche-t-il ainsi à s’autodétruire ?
Pensons aux millions de vies perdues dans les bombardements et autres actions militaires menées par de nombreux pays au cours du siècle dernier. Nous sommes tous embarqués dans le même bateau, pour le meilleur ou pour le pire.
Il existe pourtant d’autres options pour empêcher le monde de tomber dans l’abime de la destruction, pour l’amener vers un avenir plus sain. Nous pouvons affirmer à Bush que nous n’acceptons pas son diktat selon lequel celui qui n’est pas son allié est un terroriste. Nous pouvons lui dire que nous sommes prêts à l’aider, sous le contrôle des Nations Unies, à identifier les causes profondes des attentats de type terroriste, et à nous attaquer à ces causes dont nous tous sommes peut-être, en partie, responsables. Comme on l’a dit maintes et maintes fois, il ne peut pas y avoir de paix sans justice, surtout sans justice économique. Comment pouvons-nous nous attendre à la paix dans un monde où une très faible minorité possède de plus en plus des richesses, tandis que la vaste majorité, grandissante, vit dans la pauvreté ou en est menacée ? La guerre mène toujours à plus de morts et à plus de pauvreté. Est-ce cela que nous voulons ? Même James Wolfensohn, le président de la Banque Mondiale, a dit tout de suite après les attentats du 11 septembre : "L’éradication de la pauvreté est une quête pour la paix" (Interview avec David Frost, BBC World).
Une voie possible vers la justice économique est l’instauration de systèmes de revenus universels, permettant à chacun de bénéficier de ses droits économiques tels qu’ils figurent dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Nous soutiendrions Bush s’il demandait aux Nations Unies d’obliger les différentes nations, y compris les Etats-Unis et la Nouvelle Zélande, à se conformer à ces Droits économiques.