Il y a à boire et à manger et bien autre chose encore
dans le gros livre de Mar IEL qui, sans être indigeste, loin s’en
faut, rassemble le fourre-tout de 50 années de réflexions
autour des thèmes du distributisme.
L’ouvrage laisse perplexe quant à l’organisation, qu’il décrit,
de la société distributive, à la densité
des précisions ayant trait à la vie sociale. C’est une
sorte de CORAN, de THORA laïque régentant du berceau à
la tombe, la vie de chaque individu.
Après une critique bien charpentée du capitalisme, Marc
IEL s’enlise dans une conception irréelle de la nouvelle société,
posant en postulat l’égalité des besoins pour des individus
de même âge. C’est Robinson débarquant sur la planète
des singes. Son projet fait table rase des us et coutumes, des habitudes
de chacun, tous liens rompus avec ce qui a précédé.
Aux habitants de cette planète, on impose une réglementation
étroite du cadre de vie, allant jusqu’à dicter à
chacun ce qu’il doit manger. Marc IEL ’fait de sa société
un univers de tickets et de bons. Il veut ignorer la diversité
et la singularité, lai. sent f i des individualités, du
besoin de dépassement, des « différences »
qui forment la trame de toute vie sociale.
Sa société est une société rigoureusement
égalitaire, miraculeusement débarrassée des pesanteurs
inhérentes à la nature humaine, la réceptivité
intellectuelle étant supposée la même au niveau
de chaque individu.
Venue de la pensée anarchiste, une telle caporalisation surprend.
Elle n’est pas dans le droit-fil de la tolérance revendiquée
par les mouvements distributistes. D’aucuns se diront que s’il faut
en passer par là pour atteindre le stade d’une civilisation idéale,
mieux vaut s’accommoder de celle que l’on a avec ses imperfections.
Il faut savoir sacrifier à certaines injustices, à certaines
inégalités si l’on ne veut ni stériliser la recherche.
l’initiative féconde, ni paralyser les compétences. Peut-on
réellement croire à l’efficacité de l’appareil
productif si l’on commence par placer tout le monde devant la même
gamelle face à une discipline de fer ?
Qui plus est, Marc IEL évacue la monnaie de consommation pour
lui substituer un étalon « temps de travail efficace »,
bien peu réaliste eu égard aux mille cas concrets auxquels
ce système de valeur ne saurait s’appliquer, notamment en matière
de travail intellectuel, créations d’art, services, etc...
Marc IEL semble avoir été piégé par un ensemble
de vues sommaires visant la monnaie et l’abondance.
Éléments de sociologie scientifique
Lectures
par
Publication : janvier 1981
Mise en ligne : 14 octobre 2008
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Publication : janvier 1981
Mise en ligne : 14 octobre 2008