Les Jeunes et le vieux des banlieues
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Publication : novembre 2003
Mise en ligne : 11 novembre 2006
Des jeunes désœuvrés déambulaient au pied d’une barre de HLM, habillés de la tête aux pieds de produits de marque.
Un copain de mon âge (le vieux) sortait de chez lui.
— Salut papy !
— Salut les jeunes ! Qu’est-ce que vous faites là ? Vous êtes payés pour participer à une campagne publicitaire ?
— ? ? ?
— Ben oui, quand j’étais jeune, pour faire balader leurs marques dans les rues, les fabricants devaient casquer. Y avait des gens qui gagnaient comme ça leur vie. On leur accrochait deux longs panneaux autour du cou, un devant, un autre par-derrière, qu’étaient couverts de « pub » (nous on disait de la « réclame »), et ils se promenaient avec toute la journée, comme vous faites. On appelait ça des hommes-sandwichs. Vous, vous êtes arnaqués quand on vous vend ces fringues qui coûtent la peau des fesses, et en plus vous faites leur publicité gratuitement. C’est pas fortiche. Bonne journée les gars !
*
Saisir ainsi l’opportunité de donner sans en avoir l’air à ces jeunes une leçon, c’est sans doute plus efficace que tous les cours d’éducation civique, les séances de catéchisme ou la lecture du Coran.
À ceux qui seraient tentés par la délinquance, avec pour alibi qu’ils ne feraient que se venger d’une société pourrie, il serait de même opportun de faire remarquer innocemment que, quand on brûle des voitures, c’est autant de ventes en plus pour Renault ou Peugeot, si ce n’est pour les constructeurs américains, et que quand on casse des vitrines ou qu’on raie les vitres des rames de métro, cela fait le bonheur des actionnaires de Saint-Gobain. S’ils veulent que leur révolte soit utile, ils doivent d’abord comprendre que toutes les nuisances, tous les gaspillages et encore plus toutes les destructions renforcent le capitalisme. Le vandalisme, c’est de l’artisanat à côté de ce que Georges W Bush pratique à grande échelle pour relancer l’économie américaine, surtout dans les secteurs où ses amis ont des intérêts, mais cela va tout autant dans le mauvais sens, s’ils veulent un jour voir changer la société. Voilà ce qu’il faudrait leur dire. Tant pis si cela devait améliorer les statistiques de Nicolas Sarkozy. Sans compter que cela permettrait de s’occuper un peu plus des grands délinquants, ceux à partir de un milliard d’euros ou de dollars le mauvais coup, et dont on laisse actuellement traîner les affaires jusqu’à ce qu’il y ait prescription ou non-lieu.