Au fil des jours


Publication : février 1968
Mise en ligne : 22 octobre 2006

Un sous-marin militaire ! Est-ce que cela devrait exister ?

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La France rappela à l’ordre les EtatsUnis coupables de ne pas équilibrer leur balance des paiements, M. Michel Debré leur fit sévèrement remarquer qu’en agissant ainsi, ils exportaient en France leur « inflation ». (sic)

Les Américains s’inclinèrent et prirent les mesures qui s’imposaient. Leur balance des paiements va prochainement s’équilibrer. Aussitôt, M. Michel Debré leur reproche, plus sévèrement encore, que les mesures prises vont leur permettre de nous exporter leur « déflation ».(sic)

Y comprenez-vous quelque chose ?

De son côté, M. Michel Debré affirmait que, grâce à ses bons soins, notre économie était en pleine expansion. Puis brusquement, du jour au lendemain, il annonça un plan de « relance de notre économie. » Ce plan fut accueilli par des cris de joie à la Bourse, les feux de Bengale lui étant interdits.

On affirme que cette relance aura beaucoup d’effet. Presque autant que le pet d’un moineau dans un cyclone...

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Les Américains ont la curieuse manie de promener leurs bombes atomiques dans le ciel, et, chose plus grave, de les laisser choir un peu partout, même au pôle nord. Ces bombes sont heureusement désamorcées. Alors à quoi riment ces ballades aériennes ? C’est, nous dit-on, pour intercepter l’aviation ennemie en route pour anéantir les EtatsUnis. Or il existe les plus grandes chances pour que cette « aviation ennemie » se précipite à l’allure supersonique. Les avions intercepteurs n’auront donc jamais le temps de réamorcer leurs bombes.

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Notre vieil ami Jean Fourastié a fait une conférence à Besançon. En sa qualité d’économiste « officiel » il a eu droit à la présence du préfet et des corps constitués. On avait grossi l’auditoire des étudiants et même des enfants des écoles. Un de nos camarades eut l’audace de poser une question bien anodine : En raison de nos moyens de production qui tournent au ralenti, ne pourrait-on pas augmenter le pouvoir d’achat de nos compatriotes ? N’avez- vous pas remarqué que nos magasins et nos marchés regorgent constamment de marchandises, même après les fêtes de la Noël et du Nouvel an ? M. Fourastié daigna reconnaître que le niveau d’existence des Français pourrait augmenter de 2 % (sic).

Or on sait comment il calcule le niveau d’existence des Français : en additionnant les revenus des économiquement faibles et ceux des milliardaires il fait ensuite la moyenne... Quel génie !

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On annonce que 30 sociétés d’assurances viennent de fusionner pour former 3 groupes. Le Figaro, expliquant cette combinaison, précisait que les clients n’avaient rien à redouter.

Sans doute, mais le personnel de ces 30 compagnies d’assurances ?

A qui fera-t-on croire que si ces 30 sociétés fusionnent, ce n’est pas dans l’intention de diminuer leurs frais et d’augmenter leurs profits ? Or diminuer les frais, c’est économiser du personnel.

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Il faut avoir quelque effronterie pour prétendre que les concentrations d’entreprises ne feront pas augmenter le chômage. M. P. Locardel reconnaît lui- même que ce serait déjà bien beau de le stabiliser.

Notre ami François-Poncet vient de découvrir un nouvel ennemi héréditaire : c’est la Chine. Il explique dans le Figaro que les 800 millions de Chinois n’attendent que le moment favorable pour ne faire qu’une bouchée de l’Europe. Heureusement les Américains les contiennent au Vietnam et en Corée. Braves Américains ! Nous ne leur serons jamais assez reconnaissants.

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Toujours dans le Figaro (23-1-68) Jean Domenge se lamente : comment se débarrasser de nos « excédents » de lait ! La production laitière, dans les six nations du marché commun, est une « avalanche catastrophique » s’est écrié M. Mansholt à Bruxelles. Les stocks de beurre atteignent 125 millions de kilos, et on en prévoit 250 millions dans deux ans.

Où est le temps où Hitler poussait son cri de guerre : du beurre ou des canons !

Nous avons trop de beurre et vraiment un peu trop de canons.

Ces Messieurs du Marché commun supplient les vaches de produire moins de lait.

Edgar Faure estime, lui,, qu’il faut produire plus de viande. Mais alors il faut que l’Europe des six ferme ses frontières, même à la viande congelée !

Quelle horreur que l’Abondance : on espère la détruire dans un coin, elle réapparaît dans un autre. Bref nous allons de catastrophes en catastrophes.