L’homme politique
par
Publication : mars 1977
Mise en ligne : 14 octobre 2006
Jacques Duboin fut un homme politique. Député, il se fit rapidement remarquer par ses interventions. Joseph Caillaux l’appela dans son Cabinet. Il devint alors Sous-Secrétarie d’Etat au Trésor. Le Président Raymond Poincaré disait de lui : « C’est la meilleure tête du Parlement ».
Après sept ans d’activité parlementaire, Jacques Duboin comprit que les changements structurels nécessités par le développement des forces productives ne seraient jamais entrepris par les parlements. Ce sont les électeurs qui nomment les parlementaires ; or ces électeurs ne sont pas en mesure, dans leur immense majorité, de comprendre que des structures économiques faites pour des temps de rareté doivent être transformées lorsque l’abondance fait son entrée dans le monde.
Alors Jacques Duboin abandonna les activités politiques pour se consacrer à l’éducation économique des Français.
Dans une série d’ouvrages que rappelle chaque numéro de la « Grande Relève », il exposa que des structures échangistes s’opposent fondamentalement à l’abondance et à l’expansion, qu’il faut donc les abolir et les remplacer par des structures distributives.
Mais il refusa de s’aventurer sur le terrain politique de la conquête du pouvoir, laissant aux partis le soin de définir librement leur stratégie. Il se limita à déclarer que « le pouvoir politique doit être l’émanation de la nation tout entière », formule qu’il faut éclairer par le jugement qu’il portait sur l’incapacité des parlements en matière de transformation sociale. Jacques Duboin n’ignorait pas non plus - et il le disait et l’écrivait sans cependant y insister car il parlait en économiste - que les privilégiés actuels du régime emploieraient toute leur puissance à combattre son enseignement. Ils le firent en organisant systématiquement la « conspiration du silence » autour de lui. Bientôt, et malgré une vente très confortable de ses premiers livres, il ne trouva plus un éditeur pour les imprimer et les diffuser !
En 1935, les éditions Fustier publièrent en deux volumes le livre de Jacques Duboin intitulé : « En route vers l’abondance ». En fin de cet ouvrage, l’auteur reproduisit le « Manifeste-Programme » de la « Ligue pour le Droit au Travail et le Progrès Social » qu’il venait de fonder et qu’il présidait. Ce texte, écrit par lui, parle en ces termes du pouvoir politique : « ... un gouvernement issu de tous qui, engageant sa responsabilité pleine et entière, assurera d’abord la période transitoire puis réalisera dans le moindre temps et pour le bien de tous, l’organisation de l’abondance ».
Il qualifiait cette organisation de socialiste. Il l’opposait au « socialisme de la rareté » professé alors par tous les partis politiques et par tous les syndicats se réclamant du socialisme. Il espérait que peu à peu ils finiraient par comprendre la nécessité de l’économie distributive...