Le choix qui reste...


par  M.-L. DUBOIN
Mise en ligne : 17 février 2006

Sous le titre “écofascisme ou écodémocratie”, Serge Latouche passait en revue, dans Le Monde Diplomatique de novembre dernier, les éventuelles possibilités d’arrêter la croissance aveugle sur laquelle repose la survie du capitalisme, et d’éviter ainsi la catastrophe écologique de plus en plus prévisible vers laquelle nous sommes entraînés.

Alors que le consensus pour la sauvegarde de la planète, pour la préservation de l’environnement, pour la conservation de la flore et de la faune, est assez général, il cherchait à comprendre où se trouvent les “ennemis du peuple” qui activent la “mégamachine” quand, dans cette économie de marché, les grandes responsabilités ne sont plus assumées par personne ?

Un programme réformiste, tirant les conséquences de bon sens du diagnostic réalisé, peut s’énoncer en quelques points simples, constatait-il, et un économiste, A.C.Pigou, en avait déjà formulé le principe il y a un siècle. Mais ceci implique, entre autres, de mettre tous les dysfonctionnements écologiques et sociaux à la charge des entreprises qui en sont responables. Or, les « entreprises obéissant à la logique capitaliste seraient largement découragées » ce serait, en fait de réforme, « une véritable révolution ». Et l’auteur en tirait cette conclusion : « Le programme d’une politique de décroissance est donc paradoxal, parce que la perspective de mise en œuvre de propositions réalistes et raisonnables a peu de chance d’être adoptée, et moins encore d’aboutir, sans une subversion totale qui passe par la réalisation d’une utopie : la construction d’une société alternative » au capitalisme.

Restent alors deux issues : la dictature globale et la démocratie locale.

« Confrontés à la menace d’une remise en cause de leur niveau de vie, les masses du Nord seraient prêtes à s’abandonner aux démagogues promettant de le préserver en échange de leur liberté » et certains penseurs, formant le groupe de Bilderberg1, y songent « au prix de l’aggravation des injustices planétaires et... de la liquidation d’une part notable de notre espèce ».

Ceux qui, comme les distributistes, rejettent toute dictature et sont attirés par l’utopie de la convivialité, préfèrent évidemment à cette solution radicale et assassine celle qui repose sur “l’écodémocratie locale”, selon l’expression de Serge Latouche, qui estime que celle-ci ne peut probablement fonctionner qu’à l’échelle de petites unités homogènes susceptibles « de satisfaire localement la plupart des besoins essentiels » et que « l’utopie locale est peut-être plus réaliste qu’on ne croit, car c’est du vécu concret des citoyens que procèdent les attentes et les possibles ». Il cite un auteur, T.Fotopoulos, qui fixe à 30.000 environ le nombre d’habitants d’une telle unité, alors que nous avons avancé, a priori, l’échelle de la région, soit beaucoup plus d’habitants.

Le réalisme semble donc être de commencer à la plus petite échelle, comme le font les SEL ou comme tentent de le faire nos amis de la région de Mulhouse, ne serait-ce que pour susciter le débat autour de ces problèmes essentiels de notre temps et pour inciter à la réflexion sur l’organisation nécessaire et certainement possible d’une société basée sur la convivialité.