Le climat, ennemi du capitalisme ?
Publication : juillet 2019
Mise en ligne : 18 janvier 2020
Aujourd’hui, il est très majoritairement admis que le dérèglement climatique a pour cause la civilisation industrielle qui s’est développée à l’aide, dans un premier temps, de l’utilisation du charbon, puis par la suite, de celle du pétrole qui lui a procuré ce qui est appelé la “Great Acceleration”. La puissance offerte à l’homme occidental par l’extraction de ces sources d’énergie a tellement conforté sa confiance en sa stratégie de la gratification par la conquête et la destruction, qu’il n’a pas hésité à se lancer dans l’appropriation génocidaire de la planète, dans des massacres militaires et des gigantesques dégradations de la nature. Même les mots les plus accablants ne suffisent pas à décrire la réalité de ce qui fut, et est, encore entrepris. Mais, revers de la médaille, la production sans cesse croissante de gaz à effet de serre en raison de la combustion de ressources fossiles, de l’élevage à grande échelle, de la déforestation implacable et de la pollution continue des océans, provoque un réchauffement climatique d’une croissance rapide mettant en péril l’équilibre naturel, la biodiversité, les productions agricoles et même une grande partie de l’humanité.
Compte tenu de son passé, il n’était pas pensable que la civilisation occidentale évitât ou mesurât ce recours à l’énergie, tant sa volonté de puissance est depuis longtemps ancrée dans sa culture.
Pour s’autoriser cette gabegie, elle s’est dotée d’un système économique qui facilite toutes les surexploitations. Si ce capitalisme a généré des effets positifs, il ne s’agit pas d’omettre d’en souligner les graves dommages collatéraux que furent et sont encore les guerres incessantes, les horribles conditions d’existence d’une grande parties des populations sous son joug, les migrations forcées, les peuples affamés, pollués, etc… de quoi ouvrir un nouveau procès à Nuremberg, à La Haye ou ailleurs.
Le fautif, c’est lui, mais...
Le réchauffement climatique désigne le responsable : le capitalisme, qui est le bras armé de l’homme occidental en mal de conquêtes et de pouvoir, l’expression aboutie de sa psychose expansionniste et de sa guerre déclarée à la nature. Sa logique de croissance perpétuelle sans limite a trouvé dans les énergies fossiles la force de frappe adéquate pour briser toutes les résistances humaines et naturelles. Pourvoyeur de privilèges pour certains (très peu), exploiteur et manipulateur de tous les autres, destructeur et meurtrier sans scrupules (n’ayons pas peur des mots), il étend son territoire de chasse et fait planer une menace permanente, tel un “serial killer” en liberté.
La destruction surpasse aujourd’hui la production.
Le désastre et la criminalité du capitalisme se dévoilent au grand jour. Face à cette situation, on serait en droit de s’attendre au lancement d’un mandat d’arrêt international à son encontre et une mise en détention. Où se trouvent les autorités capables de faire régner la justice, sinon parmi ceux à qui les peuples délèguent leur pouvoir ? Mais il apparaît bien protégé par une mafia composée de transnationales et de gouvernements à leurs bottes, qui l’utilisent pour satisfaire leurs intérêts.
L’exemple de 2008 (renflouement des banques en graves difficultés avec l’argent public) et l’ensemble des cadeaux accordés (privatisations rentables, paradis fiscaux, exonérations multiples, transactions économiques des hommes politiques au profit des transnationales, affaires scabreuses passées aux oubliettes, etc.) montrent que les malfrats de la finance ont désormais leur état providence. Ces exemples ne suffisent-ils pas à révéler la complicité répugnante entre gouvernements et investisseurs privés ?... Assurément NON ! L’embrigadement subtil et la politique de la peur, agissant de concert, permettent la docilité bovine des peuples face aux renégats. Oui, dorénavant, et plus que jamais, le capitalisme s’est instauré comme l’ennemi des peuples, des sociétés et des cultures.
Force est de constater qu’exceptés quelques îlots de résistance, les malfrats agissent à découvert tant ils se sentent invulnérables.
Forts de cette liberté obscène, justifiée par des arguments fallacieux (devenus même grotesques tant ils sont éculés), ils continuent à agir au nom de “la grandeur de la civilisation”, à “la gloire de l’humanité” ou pour toute autre baliverne, en brandissant le mot d’ordre Laissez faire ! Afin de se fournir en énergie et en ressources nécessaires à sa survie cette bande organisée n’hésite pas à utiliser ses meilleures armes, souvent expérimentées, que sont la corruption et la stratégie du choc [1]. Qu’importent les pollutions, les destructions et tueries conséquentes, « on ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs » !
Des sacrifices inévitables seraient nécessaires sur l’autel du progrès.
Car tous les moyens sont bons pour accaparer, recéler, subtiliser ces ressources aux peuples afin d’en tirer profit à leur place. « Poussez-vous que je m’y mette et de toute façon j’ai les moyens pour vous en convaincre », paroles soi disant ”d’hommes du monde”. Les guerres et les catastrophes naturelles (par exemples : le tsunami de 2004 en Indonésie, l’ouragan Katrina à la Nouvelle-Orléans), les coups d’état militaires (par exemple : au Chili en 1973) sont utilisées comme stimulateurs du capitalisme. Quand il n’y a plus rien à détruire, tout s’arrête et les survivants atterrés constatent les dégâts. Alors les bons samaritains occidentaux arrivent pour reconstruire les pays meurtris, offrant le cas échéant des prêts, du genre plan Marshall (pour lequel, rappelons-le, la condition était d’importer pour un montant équivalent des équipements et des produits américains, notamment du pétrole en abondance [2]).
Au sujet de la guerre en Syrie, une entreprise franco-suisse, LafargeHolcim, leader mondial des matériaux et des solutions de construction, avait même anticipé la lutte victorieuse des opposants au régime de Bachar-el-Assad, en réalisant quelques tractations douteuses avec le groupe état islamiste, afin de demeurer sur place en pôle-position pour pouvoir bétonner à souhait, une fois la guerre terminée. Décidemment, ces transnationales sont toujours prêtes à porter secours aux démunis !
Car le cas LafargeHolcim n’est pas une exception, loin de là, il révèle plutôt de la normalité dans le cadre des lois économiques du néo-libéralisme. Pour parvenir aux ressources énergétiques, ou autres, les transnationales ne se salissent pas les mains. Chacun son boulot. Elles sous-traitent la stratégie du choc aux juntes et clans familiaux, censés représenter l’autorité étatique reconnue par la communauté internationale. Par contre, ces républiques bananières doivent régulièrement montrer patte blanche pour perpétuer leur règne et palper les royalties, sinon leurs chefs d’état peuvent se retrouver très vite devant la cour pénale internationale de La Haye pour crime contre l’humanité. Par exemple, les richesses du sous-sol d’Afrique du Sud et l’existence de l’Apartheid ne sont pas étrangères. 85 entreprises françaises furent aux petits soins pour le régime de Pretoria de façon (entre autres arrangements) à bénéficier d’une main d’œuvre très bon marché passée sous la thérapie du choc3. Vue d’aujourd’hui, une question embarrassante se pose : « comment la communauté internationale a-t-elle pu accepter que Nelson Mandela, militant politique contre le racisme et pour l’égalité, ait pu être enfermé autant de temps en prison pour un simple délit d’opinion ? » [2]
Quelques exemples (parmi tant d’autres !) :
- Pourquoi le peuple sahraoui a-t-il été dépossédé de ses terres et vit désormais dans des camps de réfugiés hors de son pays ? Pour le phosphore : l’activité agricole asservie à l’accumulation du capital est devenue boulimique en intrants phosphatés pour doper sa “malbouffe”. Ainsi la mise en fuite des populations autochtones au Sahara occidental est assurée militairement par la monarchie marocaine, et en Tunisie, une tyrannie nationale impose la terreur aux populations locales afin d’assurer le bénéfice du précieux minerai aux puissances occidentales.
- Pourquoi une dictature au Brésil en 1964 : le fer.
- Pourquoi un coup d’état au Chili en 1973 : le cuivre.
- Pourquoi la terreur au Zaïre-Congo : le cobalt.
Et non pas pour tous les prétextes socio-culturo-religieux étalés dans les médias, débattus à la télévision et affichés dans la presse officielle. La France n’échappe pas à la longue liste des accusés ayant utilisés ces “stratégies” criminelles afin d’assurer aux transnationales les exploitations des ressources naturelles dont le “progrès” a besoin. Pour elle aussi, l’ère du Capitalocène s’est traduite par les guerres d’Indochine et d’Algérie jusqu’à celle atroce du Yémen, en passant par celle secrète du Cameroun, celles du Biafra et du Rwanda, sans omettre la campagne de recherche atomique et la participation à bien d’autres par la vente d’armement.
Tout état de droit, toute grande nation “démocratique” possède les ingrédients indispensables qui font sa force de persuasion : agents secrets, “barbouzes”, mercenaires, groupes paramilitaires, organisations terroristes, opérations militaires clandestines et souvent sanglantes, assassinats, tortures, disparitions, suicides commandités, manipulations en tous genres, corruption, scandales financiers, réseaux occultes, lobbies puissants et invisibles. « Le miracle de l’extorsion de la plus-value et de l’accumulation du capital n’implique pas seulement de bons agents économiques rationnels dans une concurrence libre et non faussée » [2]. Selon l’ONG Global Witness, 2017 fut l’année la plus meurtrière pour les défenseurs de l’environnement.
« Les transnationales seraient au final la quintessence d’un totalitarisme qu’aucun tribunal de Nuremberg ou aucune Cour pénale internationale de La Haye ne pourrait condamner… [Ces entreprises] disposent à leur service ce que la civilisation industrielle produit de mieux dans ses universités et grandes écoles. Les sciences et les élites à haut niveau d’études sont l’élixir de jouvence pour le renforcement et le renouvellement perpétuel du Capital au XXIème siècle.” « Pour ce microcosme oligarchique la bonne santé instantanée du monde se mesure aux cotations en bourse des transnationales. En regard de ce pôle d’excellence universelle, le reste se réduit à pas grand-chose et les Etats s’en chargent. » [2]
Les COP y nagent
Certains naïfs ou manipulateurs avancent que la preuve de la préoccupation des instances gouvernementales pour le climat réside dans l’existence des COP destinées à parvenir à une solution globale. Vaste enfumage ! Il n’y a pas même d’échec de ces COP, mais une véritable imposture. Ces grandes messes internationales ne sont que des pièces de théâtre. Cela revient à croire à la bonne foi des industriels de tout bord quant à leur amour soudain pour la nature après avoir adapté leurs publicités et coloré leurs emballages en vert. Par exemple, à la veille de la COP 23 de Bonn, une plainte de deux ONG environnementales contre l’état norvégien et sa transnationale de l’offshore Statoil dévoilait le double langage d’Oslo [3]. En effet, des autorisations de prospection pétrolière dans une zone jusque là inexploitée en mer de Barents étaient délivrées. La Norvège faisait ainsi la démonstration que, même dans les “Etats de droit”, les lois environnementales et les grands principes de protection inscrits dans la Constitution relèvent de la pure fumisterie face aux intérêts d’une transnationale.
La COP 24 de Katowice aura eu le mérite « de révéler le rapport hiérarchique entre transnationales toutes puissantes et les états à leur botte ».
Il y a eu vingt quatre COP depuis 1995, et pour quels résultats et quel respect des squelettiques accords ? Depuis la première COP, le niveau de CO2 relâché croît toujours suivant la courbe d’utilisation des énergies fossiles. Certains même, et pas des moindres, ne se cachent plus pour renier ces réunions “grenellesques” tant ils sont sûrs de leur impunité et leur puissance. Ces “messes” incantatoires ne servent qu’à berner le peuple, comme hier les offices religieux et les grotesques sermons culpabilisants proclamés alors par les ministres du clergé, aujourd’hui remplacés par d’autres ministres, tout aussi cyniques et corrompus. Il y a seulement entente tacite entre les élites nationales et les dirigeants de transnationales pour la mise à sac de la planète. Pendant les négociations, en France comme ailleurs, les bulldozers s’activent, brassent des milliards de tonnes de terre et détruisent les forêts. Les partenariats public-privé n’ont jamais été si complices et engagés à ouvrir des marchés publics de plus en plus ruineux, creusant la dette au profit des géants du BTP, qui pendant ce temps détruisent les écosystèmes et larguent des mégatonnes de carbone dans l’atmosphère lors du bétonnage, mais davantage encore pour extraire le ciment et surtout l’énorme besoin en sable et granulats. Pendant les négociations, que fait en sous main la communauté internationale ? — Elle ouvre d’énormes chantiers d’extraction du charbon et du pétrole des grandes profondeurs, s’enivre pour l’Eldorado des gaz de schistes et sables bitumineux. Sans oublier l’énorme marché du développement des TIC (technologies de l’information et des communications) qui se révèle très polluant et a rattrapé le transport aérien pour les émissions de gaz à effet de serre. Sans oublier l’expansion du marché des agro-carburants et des cultures qui leur sont destinées, poursuivant la prédation des terres et des forêts. Sans oublier aussi, sous le prétexte “d’énergie renouvelable”, les projets pharaoniques des grands barrages de la Banque Mondiale, pourtant dénoncés pour ses ravages écologiques et ses destructions des communautés autochtones. Et que dire de la grande promesse du Grenelle, ce plan Ecophyto qui s’engageait à réduire l’usage des pesticides de 50% à l’horizon de 2020 ? En réalité, comme le rapporte Jean Ziegler [4], l’agriculture est devenue aujourd’hui une arme de destruction massive.
Une remarquable opportunité
Pour les mécréants du système, l’objectif est désormais bien clair. Très vite, ils ont compris que le réchauffement climatique s’affichait comme une “remarquable opportunité” pour faire admettre et imposer les technologies prometteuses de profits financiers : la bio-ingénierie, la biogénétique, la biotechnologie, le numérique, l’intelligence artificielle, les nanotechnologies, les TIC, etc… et enfin se débarrasser une fois pour toutes de cette nature sauvage qui les gène pour poursuivre l’œuvre commencée aux états-Unis et au Canada dès le 19ème siècle, nécessaire à la grande “progression civilisatrice”. Il suffit de créer des parcs payants pour les touristes nostalgiques de la nature originelle ou friands de clichés capables de leur faire obtenir un buzz sur les réseaux sociaux.
Désormais la technologie laisse entrevoir la vision d’un paradis artificiel sur Terre, une création à la mesure de la puissance de l’homme occidentalisé. Qu’importe la forêt (sauf si le bois reste ou devient source de profit), la faune (sauf dans les zoos et les réserves de chasse rentables) et le climat, si les technologies les remplacent ou les corrigent avantageusement pour l’homme et sa soif de profits. Par exemple, les pollinisateurs, on s’en…, il suffit de les remplacer par des drones miniatures programmables ; le réchauffement climatique, on s’en…, il suffit d’ensemencer le ciel d’aérosols soufrés sous forme de dioxyde de soufre, de sulfure d’hydrogène ou d’acide sulfurique (Paul Crutzen, prix Nobel de chimie, a estimé à 5 millions de tonnes par an la quantité de soufre nécessaire pour bloquer environ 2 % du rayonnement solaire !) ; la pollution des océans, on s’en…, il suffit d’accélérer le phénomène d’absorption du carbone par nos océans grâce au rôle joué par les phytoplanctons qui fournissent par photosynthèse plus de la moitié de l’oxygène de la planète ! Pour favoriser l’éclosion de ces planctons marins, une douzaine d’expériences de « fertilisation en fer » ont été conduites par les scientifiques depuis le début des années 90. En ce qui concerne la biodiversité, on s’en…, il suffit de créer des animaux appropriés à notre service par la biogénétique et les reproduire à souhait par clonage. Et ainsi de suite…
Parmi les investisseurs de ces sociétés de bio ingénierie : Bill Gates et le milliardaire canadien N. Murray Edwards, magnat du pétrole qui a fait fortune dans les sables bitumineux en Alberta. Quant à Ken Caldeira, il est associé à Bill Gates au sein de la société Intellectual Ventures, qui a fait breveter plusieurs technologies, notamment le « Strato-shield » (strato-bouclier) : des tuyaux suspendus à des ballons dirigeables dans le ciel permettant de disperser des aérosols soufrés. Quoi de mieux que cette solution miraculeuse permettant de ne pas changer le mode de développement actuel et sa consommation massive d’énergies fossiles ? Plusieurs compagnies sont sur les rangs, à l’instar de la Royal Dutch Shell qui finance une étude sur l’ajout de chaux dans les mers. Steven Koonin, alors directeur scientifique du géant pétrolier BP (avant de travailler au département de l’énergie des États-Unis), est à l’origine d’une réunion d’experts pour le compte de l’entreprise Novim Group. Elle a abouti en 2009 à un rapport influent sur l’ingénierie du climat. La géo-ingénierie est aussi appuyée par plusieurs think tanks conservateurs. « La géo-ingénierie apporte la promesse d’une réponse au réchauffement climatique pour seulement quelques milliards de dollars par an. Au lieu de pénaliser les Américains moyens, nous aurions la possibilité de répondre au réchauffement climatique en récompensant l’inventivité scientifique... Stimulons l’ingéniosité américaine. Assez du diktat vert », a déclaré le républicain Newt Gingrich, ancien président de la chambre des représentants des États-Unis.
Ainsi, conformément à la stratégie du choc décrite par Naomi Klein, le réchauffement climatique est une remarquable opportunité économique et financière, une aubaine pour l’ouverture d’un marché considérable par l’application du mot d’ordre : “utiliser tout ce qui est exploitable !” Et par-dessus le marché, pour ainsi dire, il n’y a plus aucune raison pour réduire la consommation d’énergie fossile puisque des technologies seront employées à réguler ses effets. Le capitalisme, pour ses tenants, engendre certes des problèmes mais celui-ci par les progrès technoscientifiques qu’il apporte produit les solutions qui lui insufflent une nouvelle bouffée régénératrice comme le faisait remarquer André Gorz : « Jamais le capitalisme n’a été aussi peu capable de résoudre les problèmes qu’il engendre. Mais cette incapacité ne lui est pas mortelle : il a acquis la faculté, peu étudiée et mal comprise, de maîtriser la non-solution de ses problèmes ; il sait survivre à son mal fonctionnement. Il en tire même une nouvelle force » [5]. Cette croyance, portée surtout par la minorité privilégiée, tend à se scléroser en un sectarisme mystique, d’où sa dangerosité.
Bras de fer ou non ?
Un affrontement est-il possible entre les deux minorités qui considèrent le climat comme un enjeu capital des prochaines décennies ? D’un côté les profiteurs pro-capitalistes qui attendent les effets du choc climatique pour imposer sur le marché leurs solutions technologiques et poursuivre l’ère pétrolière. De l’autre les partisans d’une autre civilisation à construire, en commun, libérée de la gabegie énergétique, avec pour objectif le bien vivre ensemble. Au milieu, une immense majorité qui constitue le ventre mou de la société, sans opinion, conditionnée au train-train quotidien, préoccupée par les derniers gadgets technologiques mis sur le marché, par l’accès à la malbouffe, par les traites à payer, les enfants à élever et le chien à promener le soir. Pour cet affrontement, pour grossir les rangs des anticapitalistes, difficile de compter sur le monde ouvrier depuis la chute du mur, c’est-à-dire depuis l’échec du socialisme marxiste. De toute façon, aucune libération n’a été l’œuvre des exploités. Elle est toujours venue de l’extérieur, pour des raisons diverses et pas forcément humanistes.
On voit qu’il est impossible de compter sur les gouvernements, ni sur les soumis ni sur les résignés.
L’espoir ne peut venir que de la jeunesse, de celle qui forme la contestation à l’encontre des gouvernements qui font le jeu des transnationales pétrolières et autres. Et notamment en ce qui concerne le problème du climat. L’”enfûmage” climatique comme on pourrait l’intituler, peut s’avérer représenter la goutte qui fera déborder le vase pour une jeunesse excédée par un manque de considération manifeste, par la menace d’une vie plongée dans la précarité et l’omniprésence obsédante de l’argent, par l’obligation de vivre dans un monde pollué, qui ressemble de plus en plus à une déchetterie sauvage et dont la destruction se poursuit inéluctablement pour le bénéfice de quelques malfrats. Car la solution qu’elle réclame, cette jeunesse, cette solution à l’ensemble des maux actuels dont le réchauffement climatique, c’est de « modifier rapidement, radicalement et de manière inédite tous les aspects de la société ». C’est-à-dire de changer de modèle économique.
François Chatel
Références : 1. 2. 3. 4. 5. 6.
[1] Quelques exemples édifiants de stratégies du choc et de corruptions figurent dans des ouvrages comme : Une histoire populaire des états-Unis, d’Howard Zinn, La stratégie du choc, la montée du capitalisme du désastre, de Naomi Klein, Big Business avec Hitler, de Jacques R. Pauwels ou encore Les nouveaux maîtres du monde et ceux qui leur résistent, de Jean Ziegler.
[2] Jean-Marc Sérékian, Capitalisme fossile, de la farce des COP à l’ingénierie du climat, éd. Utopia. Voir à ce sujet M-L Duboin Les yeux s’ouvrent, dans GR 1209 de juin.
[3] Anne-Françoise Hivert, La Norvège attaquée en justice sur le climat, Le Monde, 14/11/2017.
[4] Jean Ziegler, Destruction massive, géopolitique de la faim, éd. Le Seuil.
[5] André Gorz, Adieux au prolétariat, au-delà du socialisme, éd. Galilée.