Au fil des jours


par  J.-P. MON
Publication : août 2012
Mise en ligne : 17 novembre 2012

Tout va très bien… !

Dans la conférence de presse qu’il a donnée le 5 juillet, le président de la Banque centrale européenne a fait un sombre tableau de la situation : « Les risques sur la croissance en zone euro que nous avions identifiés se sont matérialisés ». Il a évoqué pêle-mêle une croissance négative aux deuxième et troisième trimestres 2012, l’assèchement du crédit, le taux de chômage record qui a atteint 11,1% au mois de mai dans l’union monétaire.

La crise des dettes commence à frapper les pays les plus résistants, y compris l’Allemagne, où 54% de la population ne voit pas pourquoi il faudrait continuer à dépenser des milliards pour sauver l’euro.

Pour rafraîchir encore un peu plus l’atmosphère, le Premier ministre finlandais Jyrki Katainen a estimé, le 4 juillet, que la zone euro se trouvait dans une situation aussi préoccupante qu’il y a deux ans : « La situation est dangereuse, très dangereuse », a-t-il déclaré ; et sa ministre des finances a enfoncé le clou en déclarant que « le pays ne s’accrocherait pas à l‘euro à n’importe quel prix ».

Mme Lagarde annonce que le FMI va abaisser la prévision du taux de la croissance mondiale.

La FED ne prévoit plus qu’une croissance de 2% du PIB au lieu des 2,1% attendus et fait à nouveau marcher sa planche à billets en rachetant de la dette publique.

La banque centrale britannique, elle aussi, fait marcher sa planche à billets pour injecter 62,7 milliards d’euros dans son économie.

Le chômage n’est pas près de finir !

Le taux de chômage dans les 34 pays de l’OCDE [1] devrait encore être de 7,7% à la fin de l’année, laissant 48 millions de personnes sans emploi [2]. C’est une « très mauvaise nouvelle pour le marché de l’emploi » a déploré le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria, lors de la présentation du rapport qu’il a faite à Paris. Les défis auxquels sont confrontés les décideurs sont presque sans précédent, constate l’organisation. En effet :

• Trois ans après les premiers signes de reprise économique consécutifs à la crise financière mondiale, le taux de chômage n’était redescendu en mai 2012 que de 0,6% par rapport à son pic historique de l’après-guerre atteint en octobre 2009 (8,5%) ;

• L’emploi des jeunes a reculé de près de 7 % par rapport au niveau général de l’emploi depuis le début de la crise, et celui des personnes non qualifiées de 5 % ;

• L’emploi précaire a considérablement augmenté en raison de la réticence des entreprises à embaucher ;

• Les chômeurs de longue durée, qui comptaient pour 27% des demandeurs d’emploi avant la crise, sont désormais 35%, ce qui accroît le risque d’un chômage davantage structurel que conjoncturel en raison de l’érosion des compétences.

Alors que propose de faire l’OCDE ? Pour cette organisation, « il est impératif que les gouvernements utilisent tous les moyens à leur disposition pour aider les demandeurs d’emploi, en particulier les jeunes, en supprimant les obstacles à la création d’emplois et en investissant dans l’éducation et la formation professionnelle ». À ce discours, que l’on entend depuis toujours, M. Gurria ne craint pas d’ajouter des évidences telles que : « Les États doivent faire face à la crise de l’emploi avec des mesures de politique macroéconomique adaptées » !

Pour faire un peu actuel, le rapport insiste cependant sur le fait « qu’il faut des mesures immédiates pour stabiliser le système bancaire européen, et un assouplissement de la politique budgétaire dans la mesure où les gouvernements conservent une marge de manœuvre », ce qui est contradictoire avec les politiques de rigueur imposées à de nombreux pays.

La solution est pourtant évidente : c’est une baisse importante de la durée du travail pour tous, sans diminution de salaire. Mais pour cela, il faut en finir avec le système capitaliste.

Un gaspillage effarant

Outre de nombreux autres méfaits, un des plus graves dangers du capitalisme est la menace qu’il fait peser sur l’environnement et l’épuisement des ressources naturelles de la planète.

Ainsi selon les estimations fournies le 6 juillet dernier par l’Université des Nations Unies [3], les équipements électriques et électroniques produits dans le monde en 2011 contenaient, outre d’autres métaux peu abondants (le cobalt, le palladium) environ 320 tonnes d’or (soit 7,7% de la production mondiale) et 7.500 tonnes d’argent. Mais moins de 15% de ces quantités sont recyclées.

Ces quantités d’or et d’argent sont pourtant évaluées respectivement à 13 et à 4 milliards d’euros. Ce qui est loin d’être négligeable.

Deux phénomènes contradictoires expliqueraient ce faible taux de recyclage : la grande dispersion dans le monde des flux de collecte de déchets d’équipements électroniques et électriques. Le taux de collecte est faible (environ 10%) dans les pays industrialisés riches qui possèdent les technologies adéquates [4] et élevé (80 à 90%) dans les pays en développement qui préfèrent recycler des métaux plus faciles à extraire comme le cuivre, l’aluminium ou l’acier [5]. Comme le dit un représentant de l’entreprise belge de recyclage des métaux précieux : « il faut passer de la gestion des déchets à une logique de gestion des ressources ». Cela pourrait aussi permettre de réduire un peu le chômage !


[1OCDE = Organisation de Coopération et de Développement Economique.

[2Rapport annuel sur les perspectives de l’emploi, 10/07/2012.

[3Créée en 1973, l’Université des Nations unies (UNU) constitue la branche universitaire de l’ONU et sert les buts et principes énoncés dans la charte de cette dernière. L’UNU entreprend des recherches pour résoudre les problèmes mondiaux urgents tels que la survie, le développement et le bien-être humain.

[4La réglementation européenne rend pourtant obligatoire l’extraction de la fraction recyclable des DEEE et son envoi dans les filières autorisées.

[5Généralement dans des conditions désastreuses pour l’environnement et la santé des personnels