La vénération du passé
Publication : mars 1987
Mise en ligne : 21 juillet 2009
Les capacités de production dues aux développements technologiques de ces dernières années sont telles que, même depuis le début de la crise, les progrès matériels ont été considérables. Voici ce qu’écrivent à ce sujet Y. Bresson et P. Guilhaume, dans " Le Participat ", ouvrage que nous avons analysé dans ces colonnes (n°853) :
Le ralentissement de la croissance depuis 1973 est probablement en France la cause principale du pessimisme notamment parce qu’il a réduit chaque année la part supplémentaire des ressources à partager, et parce qu’il s’est accompagné d’une progression régulière et plus forte du chômage. Chacun, étrangement, paraît s’être convaincu que la vie était meilleure avant la crise et s’entretient dans la nostalgie des "trente glorieuses" achevées au début des années 70.
La réalité est toute différente
; objectivement la France de 1985 vit beaucoup mieux dans son ensemble
que celle de 1973 et il est sûr qu’un retour au prétendu
âge d’or de l’avant-crise serait insupportable pour tous les Français
qui _ comme le souligne un rapport du plan _ seraient privés
de 30 % du parc automobile, posséderaient quatre fois moins de
téléphones, dépenseraient 50 % de moins pour leur
santé, 40
de moins pour leurs loisirs... De même il est inconstestable que
la ponction croissante opérée par l’Etat et la Sécurité
Sociale n’a pas empêché la croissance du pouvoir d’achat
réel des ménages.
La conviction sincère - et totalement injustifiée - qu’ils vivaient mieux avant maintient les Français dans un pessimisme démobilisateur comme l’idée qu’il convient de rétablir les mécanismes de la croissance d’autrefois empêche de considérer que ce sont les règles et les modes de fonctionnement de l’économie et de la société qui sont en cause. Les réponses d’hier peuvent faire encore la presque unanimité des clercs (souvenons-nous de l’unanimité des années 30 !) ; elles n’en sont pas moins inadaptées.
(relevé par A. Prime)