Au fil des jours
par
Publication : juin 1990
Mise en ligne : 17 mars 2009
Hersant passe à l’Est
Hersant a nommé Directeur Général de sa nouvelle
société SCII Presse Contact, Pierre Schapira, ancien lieutenant
de feu Doumenc, le milliardaire rouge. Pas fou : il s’agit d’investir
les média à l’Est. La première revue "Business
in the URSS" paraitra en mai. "Outre les radios qu’il contrôle
déjà à l’Est, Hersant a d’autres projets de presse
pour tous les anciens satellites de l’URSS, notamment en Hongrie où
il a déjà installé un bureau de douze personnes".
Hersant est pressé car le groupe allemand Springer a déjà
racheté neuf journaux à Budapest. Et Maxwell, d’origine
tchèque s’empresse.
(d’après le Canard enchainé)
Gageons que tous ces patrons de presse et radio de l’Ouest font tout cela pour instruire les habitants de l’Est de la vraie doctrine socialiste !
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Bravo les petits juges
Pour protester légalement contre le scandale de l’auto-amnistie
de nos députés qui se sont blanchis - à droite
comme à gauche - des juges libèrent des petits délinquants.
Quelle leçon ! Tu voles une pomme, tu mérites la prison.
Tu bénéficies de millions volés en tant qu’élu
du peuple ou tu les voles toimême, tu es blanc comme neige. Quelle
honte, surtout pour vous, Messieurs les socialistes, qui étiez
tant "mouillés".
***
Gorbatchev en péril
La "sortie" de Gorbatchev, lors du défilé du
premier mai 1990 sur la place Rouge, préfigure-t-elle, comme
l’a suggéré un journaliste, le destin du maître
actuel de l’URSS ? L’Histoire le dira dans un temps relativement rapproché.
On pourrait être exaspéré à moins
portrait du dernier Tsar Nicolas II, Grand Christ brandi, apostrophes
contre le "Ceaucescu du Kremlin"..., un comble pour celui
qui, fidèle à pérestroïka et glasnost, avait
autorisé l’opposition à défiler. Ce n’était
plus une manifestation constructive de la liberté retrouvée,
mais une provocation pure et simple.
II n’en reste pas moins que le mal étant fait, Gorbatchev aurait
dû faire front, prendre la parole, ce qui aurait évité
que le lendemain des Moscovites interwievés n’hésitent
pas à qualifier sa fuite de lâcheté.
Et que dire de la presse du monde entier au matin du 2 mai ? La revue
de presse d’Ivan Levaï était édifiante. Où
était le Gorby dont on disait aux EtatsUnis, lors des élections
présidentielles, que s’il s’était présenté,
il aurait été plébiscité ?
Essayons de faire le point. II y a des mois que nous signalons - en
le regrettant - la fragilité de Gorbatchev, certainement homme
de coeur, mais aussi quelque peu enfant de choeur. Sa vulnérabilité,
dans son désir de bien faire, aura certainement été
sa naïveté, relative bien sûr, mais suffisante pour
se faire piéger par les Occidentaux qui ont inventé Gorby
pour obtenir de lui ce qu’ils voulaient, à savoir la fin du communisme
à l’Est et, par voie de conséquence, du socialisme tout
court (1). Les résultats sont là, éloquents, au
fur et à mesure que se déroulent des élections
à l’Est.
II faut bien comprendre la concession faite par Mitterrand, Kohl et
Bush à Gorbatchev en ce qui concerne la Lituanie. Le fruit soviétique
n’étant pas mûr, il ne faut surtout pas qu’un coup d’Etat
militaire (2) vienne remettre tout en question (3). D’ici quelques mois,
au rythme auquel se déroule le processus de pourrissement de
la situation (économie, nationalités), Mitterrand et ses
compères pensent que le fruit tombera de lui-même, c’est-à-dire
que les masses feront la révolution comme dans les autres pays
de l’Est. Mitterrand a prophétisé que la "Révolution",
partie de l’URSS, finira en URSS.
Quand les réformateurs réclament des mesures "radicales",
demandent à Gorbatchev d’aller encore plus loin, traduisez :
on veut l’économie de marché pure et simple, on ne veut
plus entendre parler de communisme, pas même de socialisme.
Gorbatchev semble n’avoir que deux solutions : la fuite en avant jusqu’au
capitalisme ou la démission. II tenterait alors sans doute une
sortie non infamante, proclamant que, ne pouvant réaliser ses
objectifs et ne voulant pas trahir (totalement) le socialisme, il abandonne
le pouvoir à d’autres.
Le capitalisme "triomphant" à l’aube de la dernière
décennie du siècle devrait dresser trois statues : l’une
en or à JeanPaul 1 !, la deuxième en argent à Gorbatchev,
ou plus précisément à Gorby, la troisième
en bronze à Mitterrand, subtil soutien de "l’ordre établi".
André PRIME
(1) Souvenez-vous, Kohl à "l’Heure de Vérité
"Sans la pérestroika, il n’y aurait jamais eu d’élections
en RDA, Hongrie, etc..."
(2) Cet article a été rédigé avant le 7
mai, jour où a eu lieu sur TF1 un débat très instructif
après la projection du film "un train pour Pétrograd".
Participait à l’émission unmembre de l’ambassade d’URSS
à paris. A la question "Que craignez-vous le plus ?",
il a répondu "Un coup dEtat militaire et la dictature"
(3) voir dans mon article "la Relève" ce que Gorbatchev
a confié à Mitterrand lors de leur rencontre à
Kiev.