Une mesure transitoire avant l’Economie distributive
par
Publication : novembre 1985
Mise en ligne : 16 mars 2009
Après le changement de cap à droite
de la C.F.D.T., concrétisé par le vote favorable (à
64 %) du quitus à l’équipe dirigée par E. Maire,
il n’y a plus d’organisation de masse réellement anticapitaliste
(l’objectif CGT étant un capitalisme d’Etat).
La parti socialiste (PS) a également oublié l’engagement
pris dans sa déclaration de principe : « Il ne s’agit pas,
pour nous, d’aménager le système capitaliste, mais de
lui en substituer un autre ». Il est maintenant clair que le P.S.
n’envisage aucunement (il l’a assez prouvé) de sortir la France
de l’économie marchande - inhérente au système
capitaliste - qui engendre, à la fois, le chômage et l’exploitation
des travailleurs. La constatation de cette réalité décevante
ne doit pas nous faire perdre l’espoir et succomber à la tentation
de tout abandonner. Il est important de l’intégrer dans notre
recherche de nouveaux moyens qui permettent d’aller dans le sens d’une
réunification et d’une remobilisation de la classe ouvrière
; de toutes les composantes de la classe ouvrière. Car il est
dangereux de mettre à la poubelle les « laissés
pour compte de la société en construction », en
amalgamant les vieux, les drogués, les chômeurs etc...
Les véritables « damnés de la terre » ne sont
plus aujourd’hui ceux qui travaillent, mais ceux qui sont abandonnés
sur le bord de la route par la société capitaliste. Si
les sans travail et les travailleurs précaires ne sont pas intégrés
dans une stratégie anticapitaliste, je ne vois pas comment la
lutte pour un vrai socialisme démocratique (socialisme des Droits
de l’Homme), a la moindre chance de succès. Par ailleurs, il
ne s’agit pas non plus d’essayer de résister aux restructurations
imposées par l’évolution technologique (par le progrès)
car ce serait s’engager dans des luttes (« pas de licenciement
») perdues d’avance, qui peuvent au mieux être de retardement...
les faits sont têtus et l’ont assez démontré !
La seule chance pour remobiliser la classe ouvrière, est d’unifier
et d’intégrer les trois composantes de ce qu’elle était
(c’est-à-dire tous les travailleurs) :
1) La composante des travailleurs permanents, à
statut et garanties sociales, qui se rétrécit et voit
ses garanties grignotées.
2) La composante des travailleurs précaires (intérimaires,
à durées déterminées, etc...), sans garanties
ou à faibles garanties, avec des salaires médiocres.
3) La composante d’exclus du travail à la recherche de petits
jobs et sans ressources, ou presque...
Les deux dernières composantes communiquent et se développent
rapidement.
Le total de l’addition = LA CLASSE OUVRIERE !
Pour réussir la réunification de la classe ouvrière,
il nous faudra réussir l’unification de tous les anticapitalistes
réels sur un minimum d’objectifs et de revendications communes
CREDIBLES, c’est-à-dire des revendications par lesquelles les
travailleurs peuvent à nouveau ESPERER, en combattant pour elles,
obtenir des résultats positifs et/ou de poser des jalons pour
sortir de l’économie marchande inhérente au système
capitaliste qui est le responsable essentiel de la division de la classe
ouvrière.
RECONSTRUIRE L’ESPOIR
Reconstruire l’espoir détruit chez les travailleurs,
c’est partir de leurs aspirations et surtout de leurs problèmes
immédiats de vie ou de survie, et non leur promettre de raser
gratis demain... Car les problèmes immédiats sont flagrants
: l’emploi ou le droit à une activité, les salaires ou
le droit aux ressources nécessaires pour vivre décemment.
Mais alors, que faire quand il faut se rendre à l’évidence
que le nombre d’emplois transformés et créés est
largement inférieur aux emplois supprimés ? ou encore,
quand l’appareil productif de biens et de services peut réaliser
tout ce dont le monde a besoin, mais qu’il n’a plus besoin de tout le
monde ? Et, quand dans le système capitaliste périmé,
il faut toujours VENDRE sa force de travail par un emploi pour gagner
de l’argent pour vivre ! Un seul moyen s’offre à nous pour obtenir
la satisfaction des BESOINS DE L’HOMME sans subir le « goulag
» des « inactifs et des assistés » : répartir
le travail salarié sur l’ensemble de la population active en
réduisant la durée du travail en conséquence. Mais
hélas, dans le système capitaliste avec son inhérente
économie de marché, la quantité d’argent qu’il
faut gagner pour vivre, reste encore toujours liée au temps de
travail VENDU ou au temps de l’emploi (chez les précaires). Dans
cette situation, reconstruire l’espoir de TOUS les travailleurs, c’est
trouver et proposer des revendications contenant des critères
qui permettent de répartir équitablement entre TOUS (TES),
non seulement LE TRAVAIL, mais également les REVENUS et/ou RESSOURCES.
Résoudre durablement ce problème, nécessite une
rupture avec le système capitaliste et l’abolition de son inhérente
économie de marché dont le moteur est le profit. Pour
avoir un profit maximum, il faut produire à bon marché.
La machine - plus rentable - remplace donc le travail humain, d’où
chômage.
Pour faire du profit (seulement possible pour certains) il faut recréer
des raretés, d’où destruction de marchandises utiles.
Pour faire du profit, il faut absolument vendre et n’importe quoi, d’où
gaspillages, fabrication de gadgets inutiles, dont les armes... au lieu
de fabriquer des biens utiles servant à la satisfaction des besoins
normaux de vie et de les répartir équitablement, c’est-à-dire
REMPLACER L’ECONOMIE MARCHANDE par une ECONOMIE dite DISTRIBUTIVE !
Il ne suffit pas d’avoir raison sur l’analyse et de dire il faut rompre
avec le système capitaliste et son économie marchande,
parce que c’est l’évidence pour sortir du cycle infernal. Nous
devons absolument répondre à la question : comment pouvons-nous
encore nous battre contre la DUALISATION ». (les protégés
et les non protégés, ceux qui peuvent « gagner »
leur vie et ceux qui ne le peuvent plus (ou très rarement) de
l’économie, contre cet éclatement de la société
que la droite admet et que la soi-disant gauche qui gouverne accepte
comme inévitable, ou préconise : elle en fait la promotion
!... La seule ALTERNATIVE réellement de GAUCHE à la société
ECLATÉE, c’est une société ou tout le monde peut
travailler, mais travailler peu, tout en étant assuré
sa vie durant, d’une allocation, d’un revenu, ou de ressources permettant
une vie normale, en échange de la faible quantité de travail
encore nécessaire.
Même si cette alternative n’est pas immédiatement réalisable
ou plutôt parce que cette alternative n’est pas immédiatement
réalisable, nous devons forger le, ou les outils de lutte, hors
du terrain parlementaire et hors de la fausse alternance « gauche/droite
» c’est-à-dire, hors d’une stratégie bassement électoraliste,
car les dernières élections l’ont démontré
une nouvelle fois : « élections piège à con
». Le système électoral du « chèque
en blanc » est inadmissible pour de vrais démocrates, et
donc pour de vrais socialistes. Je n’entre pas ici dans les détails
d’un fonctionnement réellement démocratique par les conseils
des communautés de base, ce n’est pas le but de cette contribution
qui consiste à proposer de nouvelles revendications unifiantes
et remobilisatrices. Des revendications qui permettent de reconstruire
un rapport des forces favorable aux travailleurs.
Je reste persuadé qu’aucune stratégie anti-capitaliste
n’est possible avec des chances d’aboutir, sans intégrer toutes
les composantes de la classe ouvrière et puis également
l’ensemble des luttes « populaires » : pour l’écologie,
pour les libertés, contre le racisme, contre la guerre... même
si tout le monde n’a pas encore conscience de la cause fondamentale
: le système capitaliste avec son inhérente économie
marchande.
L’Economie marchande ne produit pas pour l’Homme privé de revenu,
elle ne connait que le client ! L’homme n’est ni bon, ni méchant,
il cherche à vivre... Sans abandonner la lutte pour des salaires
décents, contre les inégalités, pour de meilleures
conditions de travail et la réduction du temps de travail de
ceux et de celles qui ont encore un emploi, il faut également
engager le combat AVEC et POUR ceux et celles qui ont déjà
été éliminés par l’économie marchande
modernisée et qui, en plus sont qualifiés « d’inactifs
et d’assistés ». Le seul moyen que notre groupe a trouvé
dans le sens d’une unification et d’une remobilisation des travailleurs
(pour qu’ils aient de nouveau envie de se battre), est que tout le monde
puisse travailler ou avoir une activité rémunérée.
C’est ainsi que nous proposons à tous les anticapitalistes et
tout simplement à tous ceux et toutes celles qui veulent agir
pour se sortir, eux et leurs semblables, de la misère et de ces
injustices, d’exiger des organisations sociales, syndicales et politiques,
de militer avec et en faveur des exclus (es), c’est-à-dire une
stratégie commune au mouvement ouvrier ou une unité populaire,
pour la mise en place d’une loi d’urgence, ou, obtenir une réglementation
qui, d’abord autorise, puis promeut une sortie progressive de « l’assistance
» et de la non garantie des emplois temporaires-précaires.
Une règlementation qui consiste prioritairement et en première
étape, à CONSERVER tous les emplois menacés, par
une diminution, proportionnelle au nombre d’emplois menacés,
de la durée du travail de toutes celles et de tous ceux qui sont
employés par une unité économique ou un «
site ». COMPENSER la diminution correspondante du salaire par
une indemnité compensatrice du type « indemnisation du
chômage partiel » mais compensant mieux les bas salaires.
Il s’agit de compenser le manque « à gagner sa vie »
correctement ! SANS ETRE : NI INACTIF, NI ASSISTÉ !
Dans les cas où une diminution du temps de travail, proportionnelle
au nombre d’emplois menacés d’un « Site », ferait
descendre l’horaire hebdomadaire en dessous de 32 h ou même 24
h, ainsi que dans les cas des premières demandes d’emplois non
satisfaites (des jeunes, des femmes), il faut que cette réglementation
permette la création d’Agence Locales pour la Promotion du Droit
à une Activité : (activité professionnelle, culturelle
ou de solidarité) A.L.PRO.D.A. nous les concevons proches des
gens, par exemple au niveau du canton. L’A.L.PRO.D.A. est comparable
à une entreprise (toute personne demandeuse d’un emploi après
licenciement, départ volontaire, jeunes sortis de l’école,
femmes...), si elle en manifeste la volonté, est embauchée
par l’A.L.PRO.D.A. ; embauche qui comporte l’engagement d’une présence
et d’un travail dans les conditions similaires à une embauche
normale (à durée indéterminée) chez un autre
employeur. Le système des « négriers » serait
donc éliminé ! C’est l’A.L.PRO.D.A., devenu le seul employeur
de toutes et de tous les sans-travail, qui, en-dehors des placements
de personnes à des postes permanents existants, facturerait les
prestations de sa main-d’oeuvre disponible aux « utilisateurs
» et/ou aux contractants (entreprises ou particuliers). C’est
ainsi que le FNE, les ASSEDIC, l’APEC, les fonds pour les TUC, etc...
n’apporteraient qu’un appoint aux finances de l’A.L.PRO.D.A.. De ce
fait, on arrivera à sortir les gens de l’assistance et de l’inactivité
déprimantes. Il s’agit de ne plus « payer des gens en les
obligeant à ne rien faire », seulement à «
chercher » du boulot de plus en plus RARE ! ce qui, par le système
marchand de l’offre et de la demande, permet aux profiteurs (les privilégiés
du système actuel) de « donner » une aumône
au lieu de rémunérer correctement le travail.
Même si transitoirement (avant les transformations fondamentales),
un grand nombre de personnes ne peut être placé tout de
suite à un poste permanent, l’A.L.PRO.D.A. devenant l’employeur
permanent des ex-sans- travail, deviendra donc également
celui qui assurera un revenu permanent garanti et non une aumône
plus faible que les allocations « d’assistance ». En plus,
comme dans une autre entreprise, les travailleurs de l’A.L.PRO.D.A.
peuvent s’organiser collectivement (syndicat)... C’est donc la possibilité
de réunifier et de remobiliser la classe ouvrière (y compris
ceux et celles de la 2e et 3e composantes) pour une lutte anti-capitaliste,
et un combat pour un socialisme démocratique à économie
distributive. Les questions de fonctionnement, de gestion, de couverture
financière, etc... sont explicitées dans la brochure «
Que faire ? » du C.L.A.C. de Thann*. La gravité des problèmes
actuellement posés par le chômage, du manque de ressources
minimales et l’inactivité de millions de personnes vaut en tout
cas la peine de tout tenter pour trouver des solutions. Une volonté
politique et syndicale permettrait d’avancer rapidement. La prise de
conscience du but .non-capitaliste et donc non marchand vers lequel
nous dirige l’évolution, est seule capable de nous réconcilier
les uns avec les autres ; de nous unir en vue de faciliter et d’accélérer
l’épanouissement d’un vrai socialisme des Droits de l’Homme par
l’Egalité Economique, seule capable de satisfaire TOUS LES BESOINS
! Ce qui précède est révolutionnaire ? Mais qu’est-ce
que la révolution ? Pour bien des gens, révolution veut
dire bagarre ! Non ! Révolution signifie : transformation inévitable.
Ce qui déclenche la bagarre, dernier refuge du désespoir,
c’est le refus de la Révolution. Lorsque le développement
des forces productives d’une société rend caduques ses
institutions, une adaptation de celles- ci ne suffit plus. Leur mutation
s’impose. Alors, ce n’est pas pour accroitre le désordre, mais
pour remettre en ordre une société déphasée,
contradictoire et absurde qu’il convient de procéder à
une refonte totale.
Aujourd’hui, les inégalités, les privilèges, les
mécanismes contraignants et paralysants entrainent de telles
incohérences et iniquités que la révolte peut jaillir
à chaque pas. Refuser cet état de choses et instaurer
un ordre social assurant la justice, la sécurité et la
dignité, donc la paix sociale
C’EST CELA, LA RÉVOLUTION !
Que la misère existe encore dans une société où
le développement des sciences et des techniques permet la création
de fusées interplanétaires, c’est un scandale qu’aucun
citoyen - à plus forte raison s’il se prétend «
social » ou se dit « socialiste » - ne peut tolérer.
(*) Adresse de contact : M. Jeanne et Pierre WENDLING 29, rue du Kurenbourg 68800 THANN