Connaissez-vous Jack LONDON ?


par  V. SOUDJIAN
Publication : juin 1985
Mise en ligne : 11 mars 2009

Dans l’oeuvre de Jack London dont certains livres sont très connus tels que « crocs Blancs », l’Appel de la Forêt », le « loup des Mers », il en est un de tout a fait remarquable mais peut-être le moins connu : « Le Talon de Fer » qui est un roman social publié en 1908 dans lequel il prophétise les événements économiques et sociaux à venir. Jack London avait le génie de voir ce qui est caché à la foule des hommes et d’anticiper avec une clairvoyance peu commune.
Adhérant au « Socialist Labour Party » en 1896, il découvrit en 1903 l’atroce misère des bas-fonds de Londres ce qui lui suggéra d’écrire « Le peuple de l’Abime  », et le mena par la suite à écrire le « Talon de Fer ».
Anatole France, qui admira ce livre, accepta d’en écrire la préface dans une nouvelle édition, en qualifiant le titre de l’ouvrage de « terme énergique désignant la ploutocratie ».
Dans cet ouvrage, Jack London décrit, avec une sensibilité indignée, l’exploitation inhumaine du prolétariat de son époque et il en analyse les conséquences futures sur le plan économique et social dans un discours, resté célèbre, qu’il prononça devant un groupe de riches New-Yorkais en décembre 1905.
Ce discours qu’il attribue dans son livre à son héros Ernest, fut admiré par Trotsky qui écrivit en 1937 à Madame Jack London, la veuve de l’auteur, une lettre dont j’extrait certains passages :
« Chère Camarade, j’éprouve une certaine confusion à vous avouer que c’est avec un retard de 30 ans que j’ai lu pour la 1re fois le « Talon de Fer » de Jack London. Ce livre a produit sur mois (je le dis sans exagération) une vive impression »... « Ce livre m’a frappé par la hardiesse et l’indépendance de ses précisions dans le domaine de l’histoire ».
Paul Vaillant-Couturier, dans une autre édition, décrit, en introduction, Jack London avec admiration et qualifie le «  Talon de Fer » de « livre de grande classe dans l’oeuvre d’un écrivain que le prolétariat peut revendiquer hardiment comme l’un des siens ».
Je ne peux m’empêcher de citer ce court extrait du fameux et long discours de Ernest devant son auditoire de New York : « ... Nous avons découvert que le travail ne peut racheter avec ses salaires qu’une partie du produit (qu’il a fabriqué) et que le capital n’en consomme pas tout le reste. Nous avons trouvé qu’une fois que le travail avait consommé tout ce que lui permettent ses salaires, et le capital tout ce dont il a besoin, il restait encore un surplus disponible. Nous avons reconnu qu’on ne pouvait disposer de cette balance qu’à l’étranger. Nous sommes convenus que l’écoulement du trop-plein dans un pays neuf avait pour effet d’en développer les ressources, de sorte qu’en peut de temps, ce pays, à son tour se trouvait surchargé d’un trop plein (par suite de son développement économique). Nous avons étendu ce procédé à toutes les régions de la planète jusqu’à ce que chacune s’encombre d’année en année et de jour en jour, d’un surplus dont elle ne peut se débarrasser sur aucune autre contrée. Et maintenant encore une fois, je vous le demande, qu’allons- nous faire de ces excédents  ? »
Après avoir écrit ce petit article, je garde l’espoir que le « Talon de Fer » soit lu par le plus grand nombre de jeunes. Si chaque lecteur de la « Grande Relève » pouvait se procurer ce livre (en neuf ou d’occasion) et l’offrir à un jeune, je crois qu’il y aurait là une oeuvre utile à accomplir.
(Je crois que ce livre existe dans la collection « 10-18 » dans la série « L’appel de la Vie » de l’Union Général d’Editions 8, rue Garancière, 75006 Paris, et peutêtre, en livre de poche).