L’heure de l’économie distributive a sonné
par
Publication : juin 1985
Mise en ligne : 11 mars 2009
L’article qui suit montre l’ambiguïté de certaines déclarations de nos hommes politiques. A partir du texte publié par le P.S. en 1980 et intitulé « Projet Socialiste » André Prime avait retenu page 32 la phrase suivante : « Il ne s’agit pas pour nous d’aménager le système capitaliste mais de lui en substituer un autre », Maurice Laudrain dénonce ici la contradiction qui suit cette déclaration :
Tous les lecteurs de La Grande Relève savent
que les distributistes préparent une action de grande envergure
afin que nul n’ignore que l’économie marchande - qui engendre
le chômage et la pauvreté dans tous les pays développés
- est périmée. Nous expliquerons à tous ceux qui
voudront bien nous entendre que l’économie de la France doit
être mise à l’heure que nous vivons, celle du grand développement
des techniques de production.
C’est une véritable économie socialiste qui s’impose,
et non pas celle d’hier ou d’aujourd’hui que certains qualifient abusivement
de « socialiste » bien qu’elle conserve les institutions
fondamentales de l’économie capitaliste. Jacques Duboin la qualifiait
d’« économie de la rareté », et il démontrait
que la France - comme tous les pays connaissant un grand développement
des techniques de production - doit passer à un stade économique
et social supérieur, celui du « socialisme de l’abondance
» qui implique la sortie de l’économie marchande et son
remplacement par une « économie des besoins » : L’Economie
Distributive.
L’action de grande envergure dont Madame Marie-Louise Duboin-Mon est
l’initiatrice, ne sera féconde que si tous les militants pour
l’Economie Distributive restent fidèles aux enseignements de
Jacques Duboin. Tout au long de sa vie, depuis 1936, Jacques Duboin
nous a mis en garde contre les demi-mesures des « socialistes de
la rareté » dont les socialistes d’aujourd’hui demeurent
de fidèles adeptes.
Il ne faut donc plus que l’on puisse lire sous la signature de militants
distributistes que « seul le remplacement du capitalisme par un
socialisme authentique comme le prévoyait, en 1980, le projet
socialiste, permettrait de résoudre le chômage et la fameuse
« crise » ».
1980, l’année évoquée par cette citation, fut celle
de l’édition par le Parti Socialiste d’un livre de 380 pages
intitulé : « Projet socialiste pour la France des années
80 ». Il n’y est aucunement question de sortir de l’économie
marchande mais seulement de... « l’organiser ». Citons en
quelques lignes fort précises : « Le marché sera
organisé autour d’offices. Ceux-ci assureront aux exploitants
la juste rémunération de leur travail, grâce à
des prix garantis » (page 206).
Nous sommes bien loin de l’enseignement de Jacques Duboin. Les précisions
qu’il donne dans chacun de ses livres sont d’un tout autre ordre. Voici,
par exemple, ce qu’il écrit dans « Rareté et Abondance
» (pages 413 et suivantes) : « Le plan... est conçu
dans le but de produire et de répartir en vue des besoins réels
de toute la population... En dernière analyse, la décision
appartient au pouvoir politique qui doit être l’émanation
de la nation tout entière.. Les établissements (entreprises)
ne sont pas assujettis à l’équilibre comptable. Ne payant
ni appointements, ni salaires, ni les fournitures qui leur sont nécessaires,
ils ne peuvent établir de prix de revient, ce qui importe peu
puisqu’ils n’ont pas de bénéfices à réaliser.
Ils tiennent donc la comptabilité des matières employées
et des temps de travail afin de permettre le contrôle de la fabrication...
»
Autrement dit, il s’agit d’une économie qui n’a pas d’autre objet
que de répondre aux besoins de la population, tous profits et
toute domination patronale étant abolis. Nous sommes sortis de
l’économie de l’achat et de la vente ainsi que de la propriété
privée des entreprises. Le travail peut alors être partagé
entre tous les citoyens valides.
C’est pour une telle société, et seulement pour elle,
que les distributistes lancent une action de grande envergure sur l’ensemble
du territoire français.