Sortir du coma


par  G.-H. BRISSÉ
Mise en ligne : 31 janvier 2009

À bien observer l’orientation des évènements, l’idéologie qui s’est imposée un peu partout sur cette planète, et qui relève d’une conception chère aux adeptes d’une économie de marché, démontre amplement son inefficacité à travers un immense gâchis doublé d’une tendance à la spéculation sans fin.

La pseudo libre concurrence proclamée dégénère en une féroce rivalité. Au lieu de mener à une baisse généralisée des prix, elle débouche sur l’effet contraire : ententes et concentrations, délocalisations et baisse du pouvoir d’achat du plus grand nombre. Et ce processus accroît dangereusement les inégalités sociales, viviers de toutes les révoltes “chaudes”.

À ces défaillances d’un modèle, on oppose le spectre de la planification étatique, engendrant une bureaucratie paralysante. C’est refuser de voir que la technologie a bien évolué depuis les années 50, que le développement accéléré et l’usage des techniques de l’information ont contribué puissamment à améliorer notre productivité et à “fluidifier” les modes de “gouvernance”

Mes propositions

Il est évident que nos grands économistes n’ont toujours pas évalué à sa juste mesure l’ampleur du désastre engendré par le système actuel. Ils se réfèrent à des modèles mathématiques censés leur apporter la confirmation par a+b de leur thèses… scabreuses ! Un ordinateur n’est jamais qu’une machine qu’on manipule à son gré, il ne peut pas s’ériger en conscience de l’Humanité !

Une évidence s’impose : depuis la Libération, l’emploi a évolué, il s’est dilué à 75 %, il s’est fragmenté en une multitude de contrats à temps partiel, le plus souvent imposés ! L’employé chef de famille ne peut plus, en général, espérer faire vivre lui-même et les siens avec un seul salaire. À tel point que l’on parle de « flex-sécurité », c’est bien reconnaître la flexibilité du travail !

• D’où la nécessité de séparer les revenus de l’emploi, donc de prévoir dès à présent un revenu social garanti (RESOG), que j’ai déjà évoqué dans ces colonnes.

• La crise dont nous subissons les effets, et qui n’est pas la première, trouve sa source dans l’excès de spéculation ; je ne m’étendrai pas sur les analyses réservées à ce phénomène. Mais il importe, dans l’urgence, de réformer le système… Le bon sens populaire a relevé que « les caisses sont vides » lorsqu’il s’agit de relever le pouvoir d’achat des citoyens, qui pourtant acquittent la TVA, mais qu’on a su trouver le moyen de lever des milliers de milliards de dollars et d’euros pour renflouer les banques !

La contrepartie de cet effort doit être, pour ces établissements financiers, d’abonder au budget national. Je rappelle donc ma proposition d’une taxe de 0,1 % sur les transferts bancaires des particuliers, et une allant jusqu’à 1 % sur les transferts bancaires des entreprises et des collectivités. Des simulations récentes ont montré que ces pourcentages infimes seraient néanmoins suffisants pour combler le trou de la Sécurité Sociale et assurer le commencement du remboursement de la dette.

• Il serait prudent par ailleurs de suggérer à l’échelle planétaire la création d’une monnaie de référence, non thésaurisable échappant aux fluctuations.

• La France s’oriente vers une dette colossale qui dépasse de très loin les critères du traité de Maastricht (1992) ; il faut fixer des règles faisant de l’euro une monnaie commune et non une monnaie unique qui favorise les spéculateurs !

• Il s’avère fondamental, dans le cadre d’une hypothétique réforme dans les entreprises (participation à la gestion et à ses grandes orientations, intéressement aux bénéfices) de rééquilibrer les pouvoirs, l’information et les profits, entre les actionnaires, les salariés, les fournisseurs en amont, et les consommateurs en aval.

• La nécessité s’imposera tôt ou tard de réserver une gestion à part au secteur agricole et, partant, au foncier qui s’y rattache, car la production agricole, son exploitation et sa distribution conditionnent l’alimentation mondiale. Il semble opportun, en outre, d’établir pays par pays le pourcentage de ce qui doit être réservé au secteur agricole traditionnel…

• Les accès à certaines matières premières doivent échapper à l’économie de marché et il faut créer un organisme mondial pour assurer la protection pérenne de leurs sources.

• Les délocalisations d’entreprises, entières ou partielles, sont haïssables ; elles doivent être combattues par tous les moyens car elles entraînent chômage partiel ou total, stress, désertification. On peut les réduire en encourageant, par voie fiscale et subventions de la puissance publique, les bénéfices investis dans l’entreprise pour des réalisations ou extensions sur place.

Autant l’investissement à l’étranger bien planifié peut s’avérer utile s’il contribue au développement de pays tiers, autant sont génératrices de conflits sociaux les délocalisations à la recherche trop flagrante d’un profit facile !

• Enfin, il faut rapidement jeter les bases d’un service civil, ou civique, national, rémunéré. Y seraient enseignés, entre autres, les droits de l’Homme et les devoirs y afférents, les différentes facettes de la citoyenneté, en plus de l’apprentissage d’un métier sous l’enseigne d’un grand ministère de la promotion sociale, à créer.

Ces quelques éléments de réflexion fort simples vont bien au-delà des “réformes” faites sous le seul prétexte de faire des économies… et qui ne servent qu’à détricoter la France, à réduire le service public à sa plus simple expression pour le remplacer par de nouvelles mafias.

On n’a pas tiré de cette crise les leçons qui s’imposent !