À la mémoire de J. MAILLOT


par  H. MULLER
Publication : novembre 1990
Mise en ligne : 19 décembre 2008

Ses familiers l’appelaient J.I.M.  Ils le savaient souffrant depuis des années, sans illusions. Un talent de tribun servi par une incomparable élocution lui avait campé une personnalité hors série mise au service de la meilleure des causes, celle à laquelle J. Duboin, l’ami des années trente dont il était resté le bras droit, l’avait initié. Toujours disponible pour appuyer une démarche, pour cautionner une action militante, s’intéressant à chaque initiative, donnant de sa personne en toutes circonstances, il savait se faire apprécier de tous ceux qui l’approchaient.

Son algarade avec Jean Coutrot avait marqué ses premiers pas de militant. Projeté sur l’estrade par J. Duboin, à l’issue d’une réunion contradictoire, sa forte personnalité s’était révélée en cette occasion, subjuguant l’auditoire. Coutrot lui offrait un pont d’or pour rejoindre ses équipes auxquelles le MFA faisait alors de l’ombre. De ce jour-là, Maillot l’incorruptible figura sur la liste noire des adversaires de la Synarchie.

En matière d’anecdotes, J.I.M restait intarissable : l’odyssée de Jean Nocher, sa "trahison", sa dénonciation du scandale de la Loterie Nationale, retirée devant l’Assemblée en échange de sa réintégration à la tribune de la radio d’où Nocher avait été écarté à la suite de son émission relatant un débarquement de martiens sur la capitale.

Son intervention, salle de l’UNESCO, face à un parterre de personnalités, ne saurait s’oublier. Interpellant Gaston Monnerville alors président du Sénat : "Pourquoi, lança-t-il, tout ce qu’il est matériellement et techniquement possible de réaliser ne peut-il l’être financièrement ? ". Une phrase qui avait laissé coi l’interlocuteur, resservie par la suite dans maintes circonstances, piégeant chaque fois les économistes classiques les plus coriaces.

Notre dernière rencontre se situe en octobre 1987. C’était à l’Aviation Club, sur les Champs Elysées, siège de l’ex-cercle européen, au temps de l’Occupation. Tel qu’en lui-même, à peine vieilli. Nous avions fait le point de nos vies assez parallèles, bavardé un long moment du passé, du présent, du futur, des disparus, des uns et des autres. II avait déjà décroché de l’action militante en raison de son état de santé, manifestant un certain désenchantement quant aux chances d’un aboutissement rapide d’une action économiquement révolutionnaire face au mur des lobbies, fer de lance des grands intérêts financiers, tout-puissants au niveau des médias et des centres politiques de décision.

Notre cher J.I.M n’est plus. Une mémoire s’est éteinte, celle d’un témoin irremplaçable de l’histoire riche et mouvementée du MFA de J. Duboin.