Au fil des jours


par  J.-P. MON
Publication : mars 1978
Mise en ligne : 28 août 2008

A qui se fier ?
Le très sérieux « Wall Street Journal » qui, a notre connaissance, n’est pas un journal gauchiste ni l’instrument de Moscou, offrait récemment à ses lecteurs un éditorial dans lequel on pouvait lire : « Les ennuis du Président Valéry Giscard d’Estaing viennent peut-être du fait qu’il a choisi un professeur d’économie politique comme Premier ministre  » !
Quand on sait que R. BARRE a été qualifié de «  meilleur économiste français » par le président de la République lui-même, on ne peut guère avoir beaucoup d’illusion sur la capacité des autres économistes et des ministres.

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Dans une interview au « Monde » du 5 novembre 1977, Lionel STOLERU, secrétaire d’Etat au Travail, se félicite de ce que, sous l’impulsion de M. BEGIN, Israël revienne enfin à l’économie libérale. Et Stoleru pose la question  : « Est-ce qu’Israël est disposé à accepter dans les années à venir la rançon du libéralisme, c’est-à-dire l’accroissement des inégalités sociales...  »
Voilà donc un aveu dépourvu d’artifices. Gageons que M.  Stoleru ne manquera pas de rappeler cette définition du libéralisme tout au long de sa campagne électorale.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, je signale que M. Lionel Stoleru est membre du Carrefour Social Démocrate.

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Apres quoi le meme Stoleru declare : « Le socialisme est synonyme de societe d’assistance, d’assurance tous risqués et d’interventionnisme public ». Je suis cependant sur que lorsqu’il ne sera plus ministre, ce qui ne saurait tarder, M. stoleru trouvera tout naturel de percevoir sa retraite payée par l’Etat et de continuer a beneficier des prestations de la Sécurite Sociale.
Quant a l’interventionnisme public qu’il deplore tant, n’est-ce pas le gouvernement dont il est membre, qui le pratique allègrement pour prendre en charge les déficits des grosses entreprises privées dont les patrons sont, bien sur, de farouches defenseurs de l’economie liberale... quand il font des benefices ?

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L’INSEE a calculé que le montant total des aides directes et indirectes de l’Etat a la metallurgie (secteur privé) s’était monté en 1976 à 60 milliards de francs lourds, ce qui représente 3 478 francs par mois et par salarié.

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Dans un article intitulé « Politique de classe » (« Le Monde » du 25-11-77) M. Pierre URI écrit. « Certaines années les subventions de tous ordres versées par l’Etat aux entreprises privées ont été plus élevées que les dépenses de fonctionnement direct des administrations civiles... On fait porter le blâme aux entreprises nationalisées alors qu’à travers elles et grâce à des ventes (transport des marchandises, gaz ou électricité, ...) au-dessous du prix de revient s’opère un énorme transfert en faveur de l’industrie privée. Il n’est pas étonnant qu’en contre-partie la part disproportionnée des charges publiques retombe, par l’impôt sur le revenu, sur les travailleurs, et, par l’impôt indirect (aux taux les plus élevés du monde), sur les familles les plus modestes, celles qui dépensent tout ce qu’elles gagnent...
Entre les impôts non réclamés et la masse des subventions de tous modèles, c’est, chaque année, depuis vingt ans, quelque chose comme 7 à 8 % du produit national qui, aux frais des contribuables effectivement trappes, va au maintien du pouvoir en place ».
Apres quoi M. BARRE prêche la rigueur pour les salariés.

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C’est quand meme bien pratique cette societe liberale avancee : estimant que le traffic n a pas atteint l’importance qu elle escomptait pour lui permettre d assurer sa rentabilité, la societe de l’Autoroute Paris-Est-Lorraine vient de demander de resilier le contrat de concession qui la lie aux pouvoirs publics.
En d autres termes, elle veut revendre a l’Etat l’autoroute qu’elle a construite, parce qu’elle ne fait pas des benéfices suffisants.
Mais entendez le tintamarre que ça ferait si les partis de gauche proposaient de nationa-liser les autoroutes !

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En Norvège, pour lutter contre le chomage, le gouvernement veut réduire ta consommation en 1975 (faut-il vraiment être un économiste brillant pour voir qu’en diminuant la consommation, on diminue le chômage...) .
Le Fonds Monétaire International exige du pauvre Portugal qu’il renforce les mesures d’austérité et notamment qu’il réduise sa croissance économique pour pouvoir bénéficier d’un prêt.
Il est vrai que le déficit de la balance commerciale portugaise aura atteint en 1977, 2,4 milliards de dollars. Mais c’est bien peu de choses à côté de celui des Etats-Unis qui dépasse 20 milliards de dollars et qui selon les experts restera à ce niveau pendant plusieurs années consécutives. Mais les Américains, eux, se moquent du Fonds Monétaire International et font baisser leur dollar afin d’exporter plus facilement leurs productions.
L’Austérité n’est pas pour les Américains !