Haute criminalité financière
par
Publication : octobre 1998
Mise en ligne : 20 juin 2008
Luxueusement édité dans un format tout à fait insolite pour le genre, Un monde sans loi [1], de Jean De Maillard, prolonge, en le complétant, celui d’un autre magistrat, Thierry Jean-Pierre [2] et s’inscrit parmi la liste, déjà longue, référencée en bibliographie, des études traitant de la haute criminalité financière.
« Une évidence saute aux yeux, mais son énoncé même reste tabou : la finance moderne et la criminalité organisée se renforcent mutuellement. Elles ont toutes les deux besoin, pour se développer, de l’abolition des réglementations et de la suppression des contrôles étatiques… Installés aux commandes de l’État-Providence, les hommes et les femmes politiques n’ont plus que des manettes qui donnent dans le vide ». C’est une économie malsaine qui submerge peu à peu le monde financier. Il s’agit du domaine mafieux, de l’argent de la drogue, celui du racket, de la corruption, de la fraude, des trafics d’armes et autres activités illicites, masses considérables d’argent sale que des réseaux s’exercent à blanchir en toute impunité. Ces procédés de blanchiment, les uns simplistes, d’autres compliqués à dessein pour égarer ou décourager les contrôles, J. De Maillard les décrit avec minutie et clarté sur un mode hautement didactique, son texte assorti d’illustrations légendées résumant, en les soulignant, les phases successives des opérations de blanchiment.
On peut s’étonner que les services chargés de la répression, soient pareillement désarmés dans leur lutte, alors qu’ils n’ignorent rien des filières empruntées par l’argent sale. « La mondialisation financière a fait entrer le cheval de Troie de la grande criminalité au coeur même des démocraties… Laissez faire, laissez aller, c’est la doctrine actuelle de la mondialisation. Alors comment pourrait- on se doter d’une législation qui rendrait les paradis bancaires et fiscaux hors-la-loi ? »
L’appel de Genève ? Un espace judiciaire européen ? La réponse va bien au-delà des voeux pieux de l’auteur. Le fer est à porter dans les usages monétaires eux-mêmes, seul moyen de neutraliser cette pollution financière, ce monde sans loi venu se greffer sur les sociétés de droit. Une monnaie de consommation se substituant à la panoplie de nos outils monétaires, mettrait un terme au tournis de l’argent. Elle serait cet instrument miracle, le sésame d’une révolution économique et monétaire, prémices d’une société nouvelle exceptionnellement séduisante attendue de toutes les victimes, conscientes ou inconscientes, de l’économie de profits.
A sa propagande, Internet devrait pouvoir ménager une ouverture que les médias lui ont, à ce jour, solidement cadenassée.
En dénonçant avec beaucoup de talent l’irrésistible progression d’un monde sans loi au coeur de nos institutions décadentes, Jean De Maillard aura sans doute aidé les mouvements de réflexion à prendre conscience de l’urgente nécessité d’une profonde et décisive innovation monétaire.