Le « Code Peyrefitte » Sécurité Liberté ?
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Publication : août 1980
Mise en ligne : 25 avril 2008
Un pâté d’alouettes. L’important : le non-dit du projet de loi, les articles byzantins, apparemment anodins que les magistrats interpréteront au gré de leur humeur et qui visent à préserver la sécurité du Pouvoir avant la liberté des citoyens.
« Indépendance et liberté ». C’est beau comme l’antique. Connaît-on un seul gouvernement qui soit indépendant du pouvoir économique exercé par les multinationales, libre de ses décisions ? Quel pays, hors l’URSS, dispose sur son territoire des matières premières, des sources d’énergie nécessaires à ses industries ? Qui tient aujourd’hui la dragée haute aux pays occidentaux, sinon les pays de l’OPEP ? Qui nous approvisionne en coton, en cuivre, en manganèse, en uranium ? Qui dicte la politique européenne dont nous subissons les conséquences au niveau des prix et de la fiscalité ?
Quant aux libertés, la société de l’argent, celle du profit n’en prend-elle pas à son aise, réglementant, interdisant, taxant, rationnant, imposant ses prix, traçant d’étroites limites à la consommation ? Nos chômeurs sont-ils libres de s’employer où bon leur semble ? Liberté d’expression ? Oui sans doute, mais dans de certaines limites, pour les oppositions cataloguées qui ne présentent pas un danger pour la ploutocratie. Des trublions se produisent sut les antennes ; leurs troupes occupent la rues avec leurs banderolles ? Qu’importe. La répression s’abat dès que la subversion passe du discours aux actes. Les médias filtrent l’information, la censure, la triture. Les radios libres sont pourchassées, les citoyens fichés, les journalistes frondeurs espionnés, leur vie privée violée. Une presse décervelante prépare de bonnes élections. Bientôt, nos tribunaux d’exception jugeront les délits d’opinion. Déjà, une société policière se met en place. La sécurité des centrales nucléaires conduit à gommer la Constitution, en supprimant le droit de grève. Sur la lancée, ne faudra-t-il pas « licencier » pareillement les chefs d’entreprise qui, n’observant pas toutes les règles de sécurité, mettent en péril la vie de leurs salariés et faire de même pour ceux qui polluent l’air que respirent les populations des alentours ? Enfin, combien de ces inculpés en « préventive », attendant que soient établies les preuves de leur culpabilité ? Et combien d’éditeurs pour les idées non conformistes ?
Ainsi de la liberté, on fait tout un plat. Mais qui est libre, hormis ceux que la fortune met à l’abri du besoin, de l’obligation de travailler sous les ordres d’une direction, de se lever de bon matin pour aller pointer à l’embauche ? Sont-ils libres les expulsés, les expropriés, les saisis, les mal-logés et toutes ces victimes de la malchance qui font cortège à la société de l’argent ?
Ne parlons ni de la liberté de l’automobiliste traqué de toute part, ni de celle du consommateur ficelé par les prix, ni celle de la Presse prise en tutelle par ses publicitaires et soucieuse de ne pas déplaire à ses grands annonceurs.
La liberté de pensée ? Voilà belle lurette que le tohu-bohu de la propagande lui a tordu le cou et les méthodes d’enseignement, les nouveaux pro grammes scolaires ne visent-ils pas à stériliser les sources de réflexion chez les générations montantes ?
Il n’y a pas de liberté sans sécurité et notre société est ainsi faite que chacun attend chacun au coin du bois pour le dépouiller, légalement ou non, du fruit de son travail.
La liberté de dire NON ? Belle affaire si une pseudo-majorité issue de scrutins ambigus, a décidé de dire OUI, l’opposition comptant pour du beurre !