Le droit de propriété et le revenu social
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Publication : avril 1977
Mise en ligne : 18 mars 2008
A QUI APPARTIENT LA NATURE ?
Selon les lois établies, le code civil et la
justice humaine, on ne possède vraiment quelque chose que si
l’on peut prouver que la personne qui vous l’a vendue en était
légalement propriétaire.
Or, prenons un exemple : Vous possédez une montre en or qui marche
bien. En avez-vous la propriété ?
Quelle est l’origine de cette montre ?
Son boîtier est en or. L’or a été extrait de la
terre. Ceux qui l’ont extrait ne l’ont pas payé. Ils peuvent
avoir acheté le terrain à quelqu’un, mais le premier propriétaire
ne l’a pas acheté : il s’en est emparé... De même,
d’autres hommes se sont emparés du fer de la terre qui fut utilisé
dans la montre sous forme d’acier ; c’est également vrai pour
les petits rubis dans la monture des pignons. A son tour le fabricant
a payé un homme qui savait faire les montres ou bien il a acheté
à quelqu’un un brevet pour leur fabrication.
Ce fut Pythagore qui divisa, le premier, le jour en vingt-quatre heures.
Il fit don au monde de cette idée et de centaines d’autres idées
sur les nombres et sur le temps.
Il n’y a pas une seule partie de la montre qui fut, à l’origine,
achetée à quelqu’un qui en ait eu le droit exclusif, car
personne n’a jamais acheté une seule chose à la nature.
Comment peut-on alors, prétendre en être le possesseur
et avoir le droit de la vendre ? Nous sommes les obligés des
grandes lois de la nature. Même l’inspiration de l’intelligence
humaine est l’effet d’une illumination naturelle.
En réalité, le seul fait de venir dans ce monde nous confère
la propriété indivise de toute la nature et fait de nous
les héritiers de la lignée de savants, de chercheurs,
d’ingénieurs qui nous ont précédés.
Il est impensable qu’un natif de cette terre soit dépourvu de
tout droit sur elle, sa nature et ses fruits et sur les fruits de l’intelligence
et du travail de ses ancêtres et des ancêtres de ses prochains.
Les premiers hommes s’attribuaient mutuellement ce droit. Le régime
féodal ne l’a aliéné que partiellement par ses
dîmes, ses tailles et ses corvées. Seul le régime
capitaliste l’a aboli pour la grande majorité des vivants désormais
voués au prolétariat.
Le but suprême du socialisme est de le rétablir sous une
forme moderne.
Cette forme, pour nous, c’est le revenu social, ou la rente sociale.
Une propriété ne vaut que par les revenus qu’elle procure.
Ces revenus ne peuvent provenir que de ceux qui achètent les
fruits ou la production de la propriété. Ceux qui ont
besoin de cette production tirent leur pouvoir d’achat, en tout cas
la plupart d’entre eux, de la vente de leur travail. Le travail humain
devenant une denrée de moins en moins nécessaire depuis
l’avènement du machinisme, la clientèle s’amenuise. Force
est donc de solvabiliser sous une autre forme les besoins de ceux qui
ne possèdent rien à échanger, même pas leur
capital travail.
***
RENDRE A L’HOMME SES DROITS
Un courant d’idées est désormais dans
l’air.
Un alinéa nouveau dans la déclaration des droits de l’homme
s’impose : « tout citoyen, dès sa naissance, reçoit
une reconnaissance le rendant propriétaire indivis de toute la
production nationale, fruit de la nature et de l’oeuvre des générations
qui l’ont précédé ».
Ce seul certificat l’affranchirait du prolétariat et le rendrait
associé à part entière dans toute entreprise à
laquelle Il apporterait son concours.
La science économique a fait de tels progrès que désormais
on peut, sans expropriation spectaculaire, réaliser le socialisme
de l’abondance.
L’Etat doit reprendre son droit régalien, lui donnant le monopole
de la création monétaire, et chaque citoyen doit pouvoir
se faire ouvrir un crédit, égal pour tous ; c’est la réalisation,
sans brimades, de l’égalité économique, chacun
affrontant la vie avec les mêmes chances et la même sécurité.
Nous avons vu que la propriété d’une usine ou d’un champ
ne confère la richesse que par son revenu. Ce revenu dépend
de son exploitation, donc des sommes investies pour elle.
Si le propriétaire de ces moyens de production doit faire appel
au crédit national, s’il ne peut obtenir suffisamment de crédit
qu’en s’associant à d’autres crédirentiers, son droit
de propriété se borne à une possession nominale
de la nue-propriété, l’usufruit étant partagé
avec ses associés.
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C’est ce partage de l’usufruit de tous les moyens de production que nous préconisons sous l’appellation de revenu social et, l’utopie, c’est de croire qu’on peut, indéfiniment en ajourner le décret d’application en espérant, par des contorsions, réaliser encore le plein emploi.