Les nouveaux lendemains qui chantent
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Mise en ligne : 31 octobre 2007
Une France de propriétaires… et d’endettés à vie.
Celui qui a la chance de pouvoir hériter d’un appartement ou d’en recevoir donation n’a pas de bile à se faire puisqu’on est en train de supprimer les droits de transmission. Et s’il est assez veinard pour en posséder plusieurs, il vaudra mieux qu’il vive de ses rentes plutôt que d’avoir à déclarer un salaire qui risquerait d’endommager son bouclier fiscal.
Mais celui qui gagne moins de 1.500 euros par mois, c’est le cas de la moitié des Français, et qui a besoin de 180.000 euros, le minimum pour un “deux pièces” à Paris, c’est-à-dire dix ans de son salaire ? Il pourra peut-être emprunter cette somme sur 20 ans et sans payer d’intérêts pendant quelques années puisque aujourd’hui tout est possible, du moins dans ce domaine. Mais comment fera-t-il pour vivre pendant ces 20 ans, d’abord avec la moitié de son salaire, car c’est ce qui lui restera après avoir remboursé la part mensuelle de son prêt (180.000 euros / 240 mois = 750 euros par mois), et beaucoup moins encore quand il devra en plus en payer les intérêts ? Il sera bien sûr obligé d’emprunter aussi pour d’autres achats, cette fois à des taux élevés, et continuera à s’endetter indéfiniment.
Dans la France de demain, il y aura donc d’un côté des propriétaires et fils de propriétaires, mais, à moins que l’on ait redécouvert les mérites de l’inflation, il y aura aussi des endettés et des fils d’endettés dont les banques auront revendu entre-temps l’appartement parce qu’ils n’auront pu rembourser leurs emprunts. C’est ce qui est en train de se passer à grande échelle aux Etats-Unis, où il n’y pas que des amis milliardaires.
A l’aune de nos valeurs actuelles, où le mérite se juge à la fortune, mieux vaut être fils de spéculateur que fils de travailleur ou pire d’avoir eu un père « mort pour la France » sans avoir pu assurer l’avenir de ses enfants. J’espère que demain, dans ce système du « chacun pour soi » où l’on aura détruit toutes les solidarités, ceux qui n’auront que leur peau à sauver pourront, s’ils en ont envie, la délocaliser dans un endroit tranquille, tout comme ceux qui aujourd’hui délocalisent leur fortune dans des paradis fiscaux.