L’ Équateur expulse le délégué de la Banque mondiale

Hors de l’hexagone, en Amérique du Sud
Mise en ligne : 31 mai 2007

Alors qu’on constate en France l’échec de l’anti-libéralisme aux Présidentielles, d’autres pays osent réagir contre la main mise de la finance sur le monde, le Vénézuela et l’Équateur, par exemple. Ce dernier vient d’expulser le délégué de la Banque mondiale et n’écarte pas la possibilité de poursuivre cette institution en justice pour cause de “dette illégitime”. Yves Pitchen nous envoie l’information tirée du quotidien équatorien El Universo du 28 avril, transmise sur Internet à l’adresse www.cadtm.org du Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers monde :

Selon une déclaration du Président de la République, Rafael Correa, faite vendredi 27 avril, en plus de l’expulsion du représentant de la Banque mondiale (Bm), le pays n’écarte pas la possibilité d’adopter d’autres mesures contre cet organisme multilatéral de crédit.

Ce jeudi 26 avril, le Ministère des affaires extérieures a émis un communiqué dans lequel il déclare “persona non grata” le représentant de la Bm, Eduardo Somensatto, qui a eu 72 heures pour quitter le pays.

Correa a affirmé hier que le gouvernement « se réserve le droit d’entreprendre des actions légales contre la Banque », en raison de sa politique à l’égard de l’Équateur. En ce qui concerne la dette du pays à la Bm, il a précisé que le pays remboursera « ce qui est justifié et pas ce que la Bm demande ».

Il a ajouté que le pays pourrait qualifier d’illégitime la dette due à la Banque mondiale.

De plus, le gouvernement est en train de prendre des mesures pour réduire la dépendance à l’égard de la Bm. La dette équatorienne actuelle à l’égard de celle-ci s’élève à 755 millions de dollars. Le Ministre de l’économie, Ricardo Patino, précise que son ministère essaie d’éviter un remboursement de 80 millions de dollars, prévu pour 2007.

Patino met en évidence que le pays a renforcé ses relations avec la Corporacion andina de fomento (Corporation andine de crédit) parce qu’elle n’impose pas de conditions quand elle octroie des prêts.

Le gouvernement a expulsé Somensatto en représailles à la suspension d’un prêt de 100 millions de dollars en 2005, quand Correa était Ministre de l’économie. La cause de cette suspension résidait dans la réforme de la loi de transparence fiscale qui remplaça le fonds pétrolier Feirep par Cereps, ce qui permit de réduire le pourcentage du budget destiné au remboursement de la dette. Patino affirme que la mesure prise par la Bm en 2005 « mit en péril la stabilité des comptes de l’État ».

Correa, de son côté, souligne que la suspension du prêt de la Bm constitue un manque total de respect de la souveraineté du pays.

Le Ministère des affaires extérieures communique qu’il n’y a pas eu de réponse officielle de la Bm à la décision du gouvernement. Des représentants de la Bm à Washington ont téléphoné au Ministère des affaires extérieures afin d’obtenir une réunion avec la Ministre Maria Fernanda Espinosa. Il n’y a pas encore de rendez-vous prévu.

La même source signale que la décision éventuelle de remplacer Somensatto est de la responsabilité de la Bm.

Il y aura une aide extérieure pour la commission de l’audit. Le Ministre de l’économie, Ricardo Patino, a annoncé qu’il invitera des experts internationaux à intégrer la nouvelle Commission d’audit de la dette, grâce à laquelle le gouvernement espère identifier la dette “illégitime” pour concrétiser une renégociation.

Parmi les candidats pour intégrer la commission on trouve le Belge Eric Toussaint, expert des prêts de la Bm, et le Péruvien Oscar Ugarteche, expert en renégociation de la dette. Tous deux ont assisté cette semaine au séminaire “Dette illégitime”, organisé par Jubilé 2000. Cette commission analysera les prêts octroyés par la Bm et les conditions auxquelles ils étaient liés.