Le chômage


Mise en ligne : 10 décembre 2006

ETATS-UNIS

En août 1935 il y avait 12 millions de chômeurs aux E.-U. Au total 20.000.000 d’habitants sont secourus et reçoivent 163 millions de dollars par mois (3 millards par an), juste assez pour ne pas mourir de faim, mais le pourcentage des maladies parmi les chômeurs est de 60 % plus élevé que parmi les travailleurs.

De 11 à 16.000.000 de jeunes gens et jeunes filles de 19 à 29 ans sont sans travail, soit de 45 à 70 % du nombre total des Américains de cet âge.

600.000 jeunes gens sont dans les camps de travail. Ils reçoivent comme salaires 5 dollars par mois, 25 dollars sont envoyés à leurs parents.

FRANCE

La bureaucratie fait la guerre aux chômeurs.

Le chômage n’est-ce pas, en, fait une guerre déclarée au travail et à la société ?.. . On ne saurait nier cette évidence, puisque la « rareté » principe de la civilisation traditionnelle, lutte contre « l’abondance », principe de la civilisation nouvelle.

Cette guerre a pour belligérants, d’un côté les travailleurs salariés de toutes industries et de l’agriculture, que le régime de l’abondance tente, puisqu’il leur procurera le bien-être auquel ils aspirent, et de l’autre les patrons, propriétaires, entrepreneurs et capitalistes, qui se cramponnent au vieux régime de la rareté, escomptant des prix élevés et des profits avantageux.

L’enjeu de la bataille entre ces deux catégories de gens, c’est la subsistance et le devenir de la classe ouvrière.

On désigne cette guerre sous le nom de « crise », en donnant à ce mot un sens calamiteux. Elle a, comme l’autre, ses embusqués, c’est-à-dire des individus qui savent se mettre à l’abri et profiter des calamités dont les autres souffrent.

Ces embusqués de la crise et du chômage, qui se sont créé une mentalité de pandores, nous en trouvons dans les offices de placement et des fonds de chômage, où ils se sont casés pour faire la guerre aux chômeurs.

Ce sont eux qui censurent et jugent les chômeurs, leur sentence est impitoyable pour les ouvriers sans travail à qui ils suppriment les vivres, sans pitié pour leur misère. Ils organisent le blocus des familles.

Cette bureaucratie, qui ne professe pas la vertu du courage, nous ramène aux anciens despotismes.

Son impudeur la pousse jusqu’à publier des communiqués de guerre et des bulletins de victoire qu’elle remporte sur « l’ennemi ». L’ennemi, pour elle, ce sont les chômeurs.

Quels sont ses succès de guerre ?... Faire condamner des chômeurs pour des actes que l’on s’habitue à considérer, abusivement, comme des faits, qualifiés crimes ou délits.

En l’espèce, il y a crime ou délit, de la part des chômeurs, s’ils travaillent étant inscrits au fonds de chômage et s’ils consomment plus que le secours qu’on leur donne.

Ainsi le veulent le vieux droit romain et la vieille morale religieuse ; le travail est réprouvé, et la consommation refoulée dans le domaine de la charité.

Ne faut-il pas que les riches continuent à être honorés et les pauvres humiliés ?... Ainsi pense-t-on maintenir le vieil équilibre du monde.

Et dire que le bon sens ne se révolte pas contre pareilles iniquités. Mais enfla, par quelle aberration en est-on arrivé à considérer que le fait de travailler et de consommer puisse être considéré, d’une façon ou d’une autre, comme un délit puni par les lois et la morale Est-ce que les travailleurs ne rendent pas à la société, sous forme de consommation, ce qu’ils lui prennent par la production ?... En definitive, la société ne perd rien puisque la balance est rétablie.

Mais la morale n’est pas satisfaite... En effet !

Ce despotisme est fonction d’une autorité implacable dont chaque employé est devenu l’organe.

Ces offices, dits paritaires, sont aujourd’hui des agences de police qui mettent les chômeurs en état de suspicion et de surveillance.

Le résultat est toujours le même pour la société : réduction de la consommation et, partant, du revenu du pays.

C’est ainsi que l’on organise la famine et que l’on rend inutilisables les richesses.

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Ces services, donc, concourent à diminuer la consommation du pays par des radiations arbitraires et par des jugements iniques, et à augmenter le nombre des sans-travail.

Ici, il nous faut faire une distinction qui pourra paraître surprenante il y a les salariés sans travail qui ne sont pas chômeurs inscrits, et il y a les chômeurs officiellement identifiés par leur inscription aux offices.

Eh bien ! le nombre des sans-travail non officiellement chômeurs peut être évalué sans exagération à huit fois le nombre des chômeurs inscrits.

Essayons de le démontrer :

M. Jacquier a présenté un rapport sur l’application de la loi sur les assurances sociales qui a été inséré dans le Journal officiel du 12 mars 1935 les chiffres ci-dessous sont tirés de ce rapport :

Nombre des salariés industriels immatriculés (1933) 8.000.000
Nombre des salariés agricoles (1933) 800.000
Total 8.800.000

D’autre part, pour la même année, il a été perçu par les A. S. 3.272 millions de francs, versés par :

Salariés industriels et commerciaux 6.400.000
Salariés agricoles 650.000
Total 7.050.000

Il reste donc 750.000 travailleurs qui ne peuvent cotiser parce qu’ils ne travaillent pas. Si nous déduisons de ce chiffre le nombre de chômeurs officiels, environ 390.000, il reste bien un effectif flottant de 360.000 ouvriers sans travail.

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Le nombre des assurés immatriculés aux services départementaux au 31 décembre 1933 était, pour les assurés industriels, de 10.685.254 ; en tenant compte des radiations, les chiffres ci-après peuvent, être tenus pour officiels :

Assurés immatriculés 10.587.526
Assurés cotisants 7.050.000
Total des assurés ne cotisant pas 3.537.536

Comme nous le disions plus haut, nous n’exagérons pas en disant qu’il y a en France une population d’environ 3.000.000 de sans-travail.

Comment vivent-ils ?...

Un ouvrier chômeur.