Décidément, les conservateurs de tous
poils sont très forts. Ils ont entrepris de nous faire confondre
le désir, fort légitime, des peuples de l’Est vers la
démocratie avec une soidisant aspiration dans ces pays à
voir l’économie de marché y imposer les désordres
du libéralisme économique. C’est un comble, car le libéralisme
conduit très exactement au contraire de la démocratie
: alors que la démocratie est la plus élémentaire
marque du respect de l’opinion et des souhaits des autres ; le libéralisme
économique mène au plus profond mépris des autres.
Ne soyons donc pas de ceux qui font semblant de confondre...
En fait, le communisme, tel qu’il a été instauré
en URSS puis imposé à ses satellites, a porté un
tort incommensurable à la pensée socialiste parce qu’il
a permis à ses opposants d’assimiler socialisme et absence de
démocratie. Comme me l’écrivait récemment notre
correspondant en Allemagne de l’Est dans un français que nos
lecteurs aménageront : le communisme "a perdu sa position
positive à cause des crimes de Staline".C’est un fait. Et
il est heureux que l’année du bicentenaire de la révolution
française soit aussi dans l’histoire des peuples, celle de l’émancipation
de bon nombre de pays de l’Est face à l’oppression d’un parti
unique qui pensait faire le bonheur des peuples sans leur demander leur
avis.
Mais qu’on ne fasse pas semblant de croire que le libéralisme,
c’est la liberté des peuples ! Il n’y a qu’à voir, entre
mille autres exemples, la vitesse avec laquelle nos marchands "libéraux"
se sont empressés de reprendre leurs démarches commerciales
avec la Chine : qu’importe pour eux la répression contre les
étudiants qui réclamaient la liberté d’expression,
l’essentiel est de faire du commerce et il n’y a pas, à leurs
yeux, de boycot qui puisse tenir lorsqu’un marché leur parait
possible. Au diable toute idéologie quand une affaire est en
vue !
Le drame serait que les peuples qui s’émancipent, mais n’ont pas l’expérience du libéralisme économique, soient dupes. Tous les moyens sont déployés pour les tromper. Auront-ils la sagesse d’y résister et d’inventer le socialisme démocratique qui n’existe encore nulle part et pour lequel, contre vents et marées, nous ne cessons de nous battre ?